Tess (1979) Roman Polanski
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Tess (1979) Roman Polanski
Tess ou les infortunes de la vertu
L’éclectique Roman Polanski propose en 1979 une relecture assez fidèle et très classique du roman victorien Tess d’Uberville de l’auteur anglais Thomas Hardy. Il avait découvert le roman grâce à sa première compagne Sharon Tate, morte dix ans auparavant et à qui le film est dédié. Exilé en France, pour des raisons que tout le monde connaît, il tournera le film non sans difficultés, avec l'aide du producteur Claude Berri, alors incontournable dans le cinéma français, comme le fera remarquer Coluche quatre ans plus tard. Sa ténacité sera récompensée puisque le film décrochera moult récompenses, dont trois Césars et tout autant d’Oscars.
Le début
C’est l’histoire d’une jeune fille du Dorset, pauvre paysanne du dix-neuvième siècle, dont les parents se découvrent par hasard des ancêtres aristocratiques. Bien décidés à sortir de leur misère, ils envoient leur fille aînée à la rencontre d’un prétendu cousin, usurpateur qui profitera de l’occasion pour profiter d'elle et séduire la jeune ingénue. Attendant un enfant, fruit de cette union non consentie, Tess retourne dans la demeure familiale et accouche d'un bébé, qui va bientôt mourir. Elle demande au pasteur local de célébrer l'enterrement, mais il refuse, car le bébé, né hors mariage, n'a pas été baptisé.
Analyse
S’ensuivent des péripéties toutes aussi malheureuses qui vont petit à petit forger le caractère de notre héroïne. Il faut dire qu’à la base elle est très jeune quand on l’envoie faire l’apprentissage de la vie. Elle ne connaît quasiment rien de l'amour et surtout des hommes, et la chute n’en sera que plus douloureuse. Il faut croire que Roman Polanski prend un malin plaisir à faire souffrir cette pauvre Tess : aux rares moments de bonheur qu’elle a l’occasion de profiter se succèdent obstinément le coup du destin qui lui fera cher payer son optimisme.
C’est sans doute ce qui la poussera inconsciemment à vouloir se faire violence et presque accepter ce destin tragique qu’elle pense inévitable. La diaphane Nastassia Kinski porte le film tout à fait honnêtement, sans livrer de performance d’actrice phénoménale mais avec une lueur dans le regard qui ne laisse personne de marbre. D'ailleurs la caméra de Roman Polanski semble la regarder bien amoureusement. Et une des qualités indéniables de Tess réside sans aucun doute la rigueur et la fidélité qui est portée non seulement à l’œuvre littéraire, reprise dans ses très grandes lignes, mais aussi et surtout à l’époque.
Les costumes, les décors mis en valeur par une très belle photographie concourent à une quasi-perfection esthétique. Le contrepoids de cet esthétisme est une certaine lourdeur dans la mise en scène : on dirait que Roman Polanski est lui-même coincé dans un corset trop serré qui l’empêche d’apporter à cette œuvre romantique les envolées lyriques qui lui auraient apporté son souffle. On obtient un film d’une qualité sans faille, un de ces beaux portraits de femme qui cherche sa voie dans l’Angleterre du siècle dernier dominée par les hommes, mais Tess manque un tantinet de chaleur pour convaincre totalement.