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Au seuil de la vie (1958) Ingmar Bergman

Au seuil de la vie (1958) Ingmar Bergman

Publié le 26 mars 2021 Mis à jour le 26 mars 2021 Culture
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Au seuil de la vie (1958) Ingmar Bergman

C’est si rare de voir de l’espoir chez Ingmar

Les spectateurs qui auront vu Au seuil de la vie jusqu’au bout comprendront ce sous-titre. C’est d’ailleurs a priori étonnant de voir la thématique de la maternité, le concept même de donner la vie, traitée par Ingmar Bergman, dont les obsessions morbides transpirent dans ses œuvres. C’est que le réalisateur suédois analyse ici les pulsions de vie, les différentes situations qui amènent ou pas à la naissance d’un être humain. Ce qui l’intéresse une fois de plus c’est la psyché, l’âme de ces trois femmes qu’il va décortiquer au plus profond. Présenté au Festival de Cannes en 1958, le film vaudra au réalisateur le Prix de la mise en scène et un Prix d'interprétation collectif, tout à fait mérité, pour l’ensemble de ses actrices.

Dans la salle des urgences d‘un hôpital, Cecilia est couchée sur un brancard, accompagnée de son mari Andres. Enceinte de trois mois, elle saigne abondement et a peur de perdre son enfant. Paniquée, elle essaye de se rassurer auprès de son mari et lui demande conseil. Elle veut surtout savoir s’il désire cet enfant, ce en quoi il élude discrètement de répondre. Alors qu’elle souffre, l’infirmière ne cesse de lui poser des questions administratives afin de remplir les formalités d’usage. Quand elle se retrouve seule, une douleur fulgurante l’assaille et elle tente désespérément d’appeler quelqu’un avant de sombrer dans l‘inconscience. À son réveil, elle comprend à demi mot qu’elle a perdu son enfant. Quand le médecin lui dit qu’elle sera en mesure d’avoir d’autres enfants, elle assure que jamais plus elle n’en désirera.

Il parait que certaines femmes se sont évanouies durant la projection d‘Au seuil de la vie. Et pourtant, ou pour cause, la violence, intense, y est plus psychologique que visuelle. Certes on voit, et surtout on entend, une femme dans une situation d’accouchement douloureux ; on apprend le récit d’une autre femme qui a subi un avortement qu’on pourrait qualifier de peu orthodoxe. On y écoute surtout des femmes qui évoquent dans les moindres détails leur rapport à la maternité, leur désir ou non d’enfant, la joie ou la douleur potentielles que ça pourrait leur occasionner. Car bien entendu on y parle surtout de douleur (on est chez Ingmar Bergman, ne l’oublions pas), de difficultés à entretenir des rapports humains, de l’absence d’amour ou d’affection. Mais on y voit également un personnage solaire, épanouie et heureuse : une figure rare chez le cinéaste. Forcément le sadisme du réalisateur lui fera vivre les pires horreurs, mais qu’importe : elle réussira à infléchir la vision pessimiste de ses amies d’un jour.

Si Au seuil de la vie remplit parfaitement le cahier des charges bergmanien des pathologies de l’esprit humain, il est également formellement fidèle aux autres œuvres du suédois. On y retrouve ce noir et blanc léché et ces gros plans sur les visages qui ont fait la marque du maître. L’impression d’étouffement psychologique que ressentent les personnages nous est parfaitement retranscrit par cet unité d’espace que figure cette maternité où ces trois femmes sont contraintes de cohabiter le temps d’une journée. Pas d’échappatoire possible, et la situation extrême combinée à un mélange de médicaments les conduit à faire face à leur situation. S’ensuivent quelques scènes d’une rare lucidité où des paroles crues vont être prononcées, et où les vérités vont sortir. Une fois encore, les femmes se montrent plus courageuses que les hommes, et leur désir d’émancipation les sauvera peut-être d’une situation inextricable.

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