Django Unchained (2013) Quentin Tarantino
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Django Unchained (2013) Quentin Tarantino
Quand le cinéma de genre devient du grand art
Le générique de début de Django Unchained est assez révélateur de ce qui va être offert au spectateur durant les prochaines heures. Tout d’abord apparaît le vieux logo de la Columbia Pictures, un petit rappel vintage que les distributeurs de cinéma utilisent de plus en plus et qui ici donne le ton : nous sommes dans l’hommage. Puis les premières notes du génériquent résonnent, celles du Django que réalisa Sergio Corbucci en 1967 ; le ton est donné : Quentin Tarantino nous embarque une fois de plus dans une histoire inspirée de son amour du septième art. Qu’on ne s’y trompe pas : le réalisateur est un cinéphile averti qui n’hésite pas à piocher dans le cinéma de genre pour ses propres films. La blaxploitation, les films d’horreur, le cinéma de kung-fu, le western, tout y passe. Avec en plus la volonté de réhabiliter le genre, car les films qu’il prend pour modèles ont longtemps été considéré par la critique comme de la série B.
Le début
Dans une clairière du Texas, en 1858, un groupe d’esclaves noirs sont enchaînés et conduits par deux négriers, les frères Ace et Dicky Speck. Ils font la rencontre d’un dentiste voyageant dans une roulotte, le docteur King Schultz, qui les interpelle au plein milieu de la nuit. Lors d’un long monologue, il demande en particulier si l’un des esclaves viendrait de la plantation où ont travaillé les frères Brittle. Une petite voix s’élève et Schultz se dirige alors vers Django, quand un des deux négriers l’apostrophe. N’appréciant pas se voir ainsi contrarié, Schultz sort son arme et l’abat d’une seule balle, en profitant également pour blesser son collègue, qui tombe et se voit coincé sous son cheval. Schultz achète tout de même de façon régulière Django et le libère, ainsi que tous les autres esclaves à qui il conseille soit de porter l’homme à l’hôpital se trouvant à des kilomètres soit de l’achever par vengeance et de gagner leur liberté.
Analyse
Les quasi trois heures que durent Django unchained ne se font absolument pas sentir. Bourré de péripéties toutes plus amusantes et divertissantes les unes que les autres, le film a le mérite d’être très bavard mais jamais ennuyeux, comme la plupart des œuvres de Quentin Tarantino. Dans ses longs-métrages, les digressions hilarantes et jouissives précèdent toujours des déferlements de violence, jamais inutiles, et il se permet même ici lors d’une scène de faire durer un dialogue pour ensuite en quelques coups de feu rapides expédier les adversaires. On reproche souvent au réalisateur sa complaisance avec la violence, or, celle-ci est quasiment toujours le support d'une narration, d'un propos. En terme de gratuité, de nombreuses différentes œuvres ne peuvent pas se targuer d'une telle justification. D'autant plus que les « boucheries » ne sont ici graphiques que pour montrer leur côté irréaliste, fictionnel, et aucunement revandicatif.
On peut leur reprocher leur objectif premier, celui d'amuser la gallerie, comme c’est le cas dans la scène susnommée, où le réalisateur apparaît et se fait zigouiller d’une traite, ce qui est pour lui une manière de montrer ainsi l’autodérision dont il souhaite faire preuve. Ironie dont il fait usage également durant tout le film, se permettant de référencer et de parodier plusieurs classiques du cinéma de façon très ludique. Ce trait caractérise Django unchained dès le titre de l’œuvre, où Quentin Tarantino se plait à faire référence à un des films de Sergio Corbucci qui n’est pas le long-métrage le plus connu des réalisateurs les plus célèbres, se gardant bien de citer Le grand silence, réalisé par le même auteur, de façon moins explicite lorsqu’il fait errer ses protagonistes dans la neige, paydage caractéristque de ce western qui réinventa en quelque sorte le genre. Tout réside dans les détails, et Tarantino en a fort bien conscience, et ce depuis le début de sa carrière.
Il prend également un malin plaisir à déconstruire le mythe d’Autant en emporte le vent, faisant littéralement exploser une plantation que l’on peut comparer à Tara, la célèbre demeure de Scarlett O'Hara, et en expédiant de façon tout aussi jouissive un personnage ressemblant à s’y méprendre à la peste de Mélanie Hamilton, incarnée à l'époque par Olivia de Havilland dans le film de Victor Fleming. Mais tout cela n’est absolument pas fait de façon didactique, l’important est dans Django unchained de prendre du plaisir. C’est la philosophie qui guide Quentin Tarantino depuis ses débuts, qui pense au spectateur avant tout, n’oubliant pas le côté artistique vu la qualité quasi irréprochable de bon nombre de ses plans. Il n'oublie pas non plus d'emporter avec lui des interprètes de haut vol, de Leonardo DiCaprio à Jamie Foxx en passant par Kerry Washington et ses fidèles Christoph Waltz et Samuel L. Jackson, tout comme les traditionnelles références, ici à Don Johnson ou bien Franco Nero.