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Miss (2020)  Ruben Alves

Miss (2020)  Ruben Alves

Publié le 21 oct. 2020 Mis à jour le 21 oct. 2020 Culture
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Miss (2020)  Ruben Alves

En robe du soir, tu prônes la tolérance

Film de clôture du Festival de comédie de l'Alpe d'Huez, Miss n'a pas manqué de faire parler de lui avant sa sortie. Des articles ont paru durant son tournage, évoquant l'implication de Sylvie Tellier dans le projet. La directrice générale de la société Miss France, qui fait un caméo dans le film, évoque à demi-mot son consentement à ce qu'une miss transsexuelle puisse un jour concourir, tout en précisant que selon elle le public ne serait pas prêt pour voter pour elle. Car c'est bien là le sujet du film de Ruben Alves, même si le personnage principal ne revendique pas l'identité trans. Reste que le réalisateur aux origines portugaises, qui avait eu un joli succès avec son premier film La cage dorée, questionne dans son deuxième long les identités, en particulier de genre, avec l’histoire de ce jeune garçon qui se rêve en miss et qui un jour décide de tout faire pour arriver à ses fins.

Les élèves d'une classe de CM1 expriment leurs souhaits pour l'avenir. Si l'une ou l'autre aimerait devenir star ou boulanger, Alex annonce qu'il rêve d'être Miss France, sous les quolibets de ses camarades. Quinze ans plus tard, il vit en colocation chez Yolande, avec des travailleuses clandestines qui reprisent des vêtements, deux amis qui cultivent du cannabis et un travesti qui se prostitue au bois. Il travaille dans un club de boxe, où il accueille les enfants avant leur cours et se moquent de son androgynie. C'est là qu'il croise Elias, un ami qu'il n'a pas vu depuis plusieurs années et qui poursuit une carrière dans la boxe. Ils évoquent leurs souvenirs et Elias lui dit qu'il n'a pas eu le courage de retourner devant la tombe des parents d'Alex. Le soir, Alex danse sur la piste d'une boîte de nuit quand un homme se déhanche derrière lui. Il se retourne et le jeune homme passe aussitôt son chemin, mais une femme au bar s'adresse à lui pour dire combien elle le trouve beau.

L'un des atouts de Miss est sa sincérité. Comme dans son précédent film, où il évoquait son enfance de fils de concierge, on sent que Ruben Alves porte cette histoire depuis longtemps. C'est sans doute pourquoi le regard porté sur les personnage est bienveillant, que ce soit envers cette directrice de casting de chez Miss France ou ce travesti vieillissant. Pourtant le sujet n'est pas facile, et le traitement pourrait faire peur ; d'ailleurs quand on a au début du film un aperçu de cette colocation qui pourrait réunir une somme de clichés ambulants, on se demande où l'on va. Et progressivement, la mise en scène apporte de la douceur à cet assemblage de pieds-nickelés, qui s'assument complètement et ça fait plaisir à voir. Bien sûr on se situe dans le registre de la parodie, et certaines scènes qui n'hésitent pas à aller dans l'outrance sont particulièrement savoureuses : on pense par exemple à cette séquence dans une roulotte qu'il est préférable de ne pas divulgâcher.

Parallèlement à cet humour décalé, Miss n'hésite pas à se confronter avec le réel. Le film est aux prises avec l'actualité et revendique d'une certaine façon son ancrage réaliste. Ainsi il aurait été beaucoup plus difficile de raconter cette histoire sans l'apparition de Sylvie Tellier ou de Vaimalama Chaves. Et c'est d'ailleurs malin pour le comité Miss France que d'avoir donné son accord, et d'avoir permis à Endmolshine de participer à la production du long-métrage. Et Miss n'hésite pas à questionner (certes gentiment) la pertinence d'une telle institution ainsi que sa modernité. Le film aborde aussi bien entendu des thèmes aussi variés que l'identité de genre ou la violence faite envers les femmes, sans discours moralisant mais avec finesse et une bonne dose de tendresse. Si l'on n'apprend pas grand chose, la portée universelle du propos ne fait jamais de mal, surtout en ce moment, où l'homophobie ne faiblit pas.

Quant au casting de Miss, il est particulièrement bien étudié. On avait déjà vu Alex Wetter défiler sur des podiums, notamment pour Jean-Paul Gaultier, et il impressionne ici par sa maîtrise et son engagement, on ne peut qu'espérer pour lui une belle carrière. On est ravi de voir Pascale Arbillot dans un rôle pas facile à tenir, et auquel elle apporte à la fois son charme et son caractère, visiblement avec un plaisir non dissimulé. En maman de substitution, Isabelle Nanty nous offre une fois de plus une très jolie prestation, émouvante et drôle, toujours sur le fil sans jamais chuter. Et l'on croise avec bonheur les deux recrues de Dix pour cent que sont Thibault de Montalembert et Stéfi Celma. Le premier et tout simplement bluffant, incarnant avec une humanité incroyable ce personnage haut en couleurs, et aussi en talons. La seconde porte avec un naturel désarmant ce rôle de concurrente vacharde, qui ne manque pas de piquant.

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