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Série noire (1979) Alain Corneau

Série noire (1979) Alain Corneau

Publié le 4 mars 2021 Mis à jour le 4 mars 2021 Culture
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Série noire (1979) Alain Corneau

Les rêves illusoires du paumé magnifique

Dans la riche filmographie d‘Alain Corneau, si un film frappe nettement c‘est bien Série noire, et c’est sans nul doute celui qui vient le premier à l’esprit à l’évocation du cinéaste amateur de polars. S’il est à part c’est surtout par son style qui se démarque totalement des policiers français de son époque. Ici Corneau adapte, avec la précieuse collaboration de Georges Perec, un roman américain de Jim Thompson. L’auteur a un style très particulier fortement marqué par la désespérance et la misère de ses personnages, et A hell of a woman, publié en 1954, ne déroge pas à la règle.

Modeste représentant de commerce, Franck essaye tant bien que mal de survivre, arnaquant son patron au passage. Comme un certain Tikidès lui doit de l’argent, il va le chercher chez son ancienne employeuse. Celle-ci lui indique où le trouver et se montre au passage intéressée par les quelques babioles que lui propose Franck. Quand vient le moment de le régler, la vieille femme lui fait une drôle de proposition : elle lui sous-entend qu’ils pourraient s’arranger en laissant sa nièce à la disposition de Franck pour le dédommager. Intrigué, le jeune homme entre dans la chambre de la jeune fille qui s’avère être une adolescente de 16 ans. Quand elle se déshabille sans mot dire, Franck essaye de la raisonner.

Si Série noire marque autant les esprits, c’est parce que le film est sans concessions et d’une noirceur absolue. Le personnage principal est un paumé total qui vivote sans ambition ni personnalité. Tout son univers est sordide : le HLM de banlieue qu’il rejoint le soir venu, son épouse déprimée, le terrain vague dans lequel il traîne… le héros, ou plutôt le antihéros, en devient sympathique aux yeux du spectateur. Le contexte dans lequel il évolue, s’il n’explique pas ses erreurs et son insensibilité, permet de mieux comprendre en tout cas ses actions. La fin du film, d’une ingéniosité remarquable, lui fera d’ailleurs un pied-de-nez formidable tout en lui révélant une sensibilité cachée.

Car c‘est aussi la particularité de Série noire que de nous dépeindre un personnage entier, dans ses failles mais aussi dans sa splendeur. Franck Poupart, ou devrait-on dire Patrick Dewaere tant le rôle lui va comme un gant et comme il lui apporte tout son talent et sa sensibilité à fleur de peau, est une belle personne. Sa rencontre avec Mona, la toute jeune (et belle) Marie Trintignant dans son premier rôle, sera le révélateur qui lui permettra de sortir en lui le meilleur, pour l’aimer d’une façon belle et pure, tout comme le pire, pour ce qu’il va tenter afin de les sortir de la misère. Et tout le talent d’Alain Corneau et de Georges Perec est aussi d’alimenter leur propos par un humour corrosif dans des dialogues précis et finement mouchetés et dans des situations parfois ubuesques. S'il n’est peut-être pas forcément le meilleur film du réalisateur (quoique), il est en tout les cas dans le trio de tête.

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