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Furyo (1983) Nagisa Oshima

Furyo (1983) Nagisa Oshima

Publié le 4 juil. 2022 Mis à jour le 4 juil. 2022 Culture
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Furyo (1983) Nagisa Oshima

Deux mondes qui s'opposent dans l'absurdité de la guerre

Plusieurs sujets prédominent dans la filmographie de Nagisa Oshima, qu’on peut sommairement résumer autour des thématiques du sexe, de la violence et de la mort. Le parfum de scandale de L’empire des sens, œuvre étonnante qui louche vers l'œuvre du Marquis de Sade, saura lui amener les faveurs du public occidental après une carrière déjà imposante. Furyo lui apporte l’occasion de traiter de la Seconde guerre mondiale avec un angle d’approche particulier : ce ne sont pas les combats qui sont ici le propos du film. C’est plutôt l’analyse de la nature humaine, et surtout des différences de cultures étreignant des soldats occidentaux et japonais dans un camp de prisonniers situé à Java. Présenté au Festival de Cannes, le film en sortit bredouille tandis que Shōhei Imamura y reçut sa première Palme d'or.

Le début

En 1942, dans un camp japonais à Java, des soldats anglo-saxons et néerlandais sont  prisonniers de guerre, soit furyo en japonais. Celui qui dirige le centre est le capitaine Yonoi, un homme dur et cruel, fidèle aux enseignements des samouraïs et à la pratique du hara-kiri. Un nouvel entrant fait son apparition en la personne du major Jack Celliers, qui vient de Jakarta après avoir été jugé car il s'était allié avec des  insoumis pour attaquer un convoi militaire. Rebelle, il n'hésite pas à braver l'autorité du capitaine, et un combat de coqs s'instaure entre ces deux fortes personnalités, qui toutefois s'admirent sans l'admettre. Ils éprouvent tous les deux de la culpabilité, l'un pour n'avoir pas assisté ses camarades lors d'un coup d'État raté, l'autre pour n'avoir pas aidé son frère quand il se faisait bizuter au lycée.

Analyse

Dans ce no man’s land viril que constitue ce camp de prisonnier, les hommes n’ont d’autre choix que de se rapprocher. Et quand on est issu de cultures aussi opposées que des britanniques et des japonais, la chose n’est pas aisée. C’est en cela que Furyo, qui est aussi connu sous son titre américain, Merry Christmas, Mr Lawrence, une des répliques emblématiques du film, est passionnant. Ne prenant en aucun cas partie pour l’un ou l’autre, les « coutumes » du hara-kiri des soldats japonais étant sobrement mises en parallèle avec celles du bizutage des étudiants britanniques, Nagisa Oshima ne fait que mettre en évidence les points de vue fondamentalement différents des protagonistes sur des sujets tels que l’homosexualité, l’honneur ou le patriotisme. 

Le personnage du lieutenant-colonel John Lawrence est en cela intéressant car s’il est bilingue il ne comprend pas pour autant mieux la mentalité de ses interlocuteurs, mais fait tout de même preuve de plus de bonne volonté que certains de ses supérieurs rigides. Quant aux rôles principaux de Furyo, ils échouent à deux pop stars, David Bowie et Ryūichi Sakamoto, qui compose l'enivrant thème musical du film, Bowie en ayant refusé de composé la bande originale pour se consacrer à son rôle. Tous deux d’une troublante androgynie, ils jouent parfaitement au chat et à la souris dans ce rapport de dominant à dominé. Leur relation évolue de façon progressive, le capitaine Yonoi, d’un sadisme assez impressionnant, n’en revenant pas qu’un simple prisonnier puisse lui tenir tête sans vergogne.

Si on ne saisit pas bien pourquoi il l’épargne au début du film, leur relation va petit à petit s’enrichir par de fines touches à peine perceptibles, pour culminer lors d’une scène sublime de mise à mort. Car Furyo, au delà de cette riche opposition entre deux mondes qui s’observent, c’est aussi une réflexion pleine d’humanité sur la guerre. Échoues au milieu de nulle part dans un conflit qui s’éternise et qui va bientôt basculer, ces soldats qui ne se comprennent pas arriveront peut-être à force de se connaître à tisser des liens forts et indéfectibles, victimes qu’ils sont de cette guerre absurde. Le film va plus loin, et développe une ambiguïté sexuelle qui ne dit pas son nom mais transparait dans des scènes de toute beauté, et qui marqueront plus d'un spectateur.

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