The laundromat : l'affaire des Panama Papers (2019) Steven Soderbergh
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The laundromat : l'affaire des Panama Papers (2019) Steven Soderbergh
Une satire efficace au casting d'enfer
Quand fin 2018 on a appris que The laundromat : l'affaire des Panama Papers serait distribué par Netflix, on n'a pas manqué de noter l’ironie de la situation, la société de vidéo à la demande ayant une politique assez efficace d’optimisation fiscale. Ce n’est sans doute pas pour déplaire à Steven Soderbergh, dont les films manient souvent le second degré, et qui s’est ici une fois de plus associé à son partenaire Scott Z. Burns pour adapter le roman de Jake Bernstein. Celui-ci raconte comment, avec l’aide du consortium international des journalistes d'investigation, une masse de données fiscales confidentielle, initialement envoyées au quotidien allemand Die Süddeutsche Zeitung, ont été relayées dans le Monde entier. Présenté au Festival de Venise, le film en sort bredouille mais la palanquée de stars qui émaillent son casting ont font dire à certaines et à certains, à tort, qu’il pouvait bien figurer en bonne place pour la course aux oscars.
Le début
Deux hommes s’appelant, on le découvrira plus tard, Jürgen Mossack et Ramón Fonseca, évoquent en smoking et champagne la naissance de l’argent. Ils discutent du mécanisme du troc puis de la monnaie fiduciaire, passant à côté d’un groupe de personnages sortis de l’ère paléolithique inférieure. En 2010, Ellen Martin se prépare à aller faire une croisière avec son mari Joe, qui est en retard. Arrivés sur le bateau in extremis, ils retrouvent leurs amis Barb et Norm, avec qui ils plaisantent. Soudain, une vague inattendue submerge l’embarcation et la fait chavirer. De nombreuses victimes sont à déplorer, dont le mari d’Ellen. Lors de la cérémonie funéraire, le pasteur évoque les nombreux morts de ce naufrage tandis qu’Ellen semble ravagée. Le capitaine du bateau apprend bientôt que l’assureur qu’il a souscrit s’est fait racheter par une compagnie de réassurance qui ne peut couvrir le naufrage. L'assureur, basé dans les Caraïbes, a pour avocats le cabinet Mossack Fonseca.
Analyse
Les premières images de The laundromat : l'affaire des Panama Papers n’entretiennent aucune illusion : nous sommes ici devant une farce. Ainsi Gary Oldman, maquillé à outrance avec son accent allemand caricatural est assorti d’un Antonio Banderas qui surjoue le nabab originaire d’Amérique du Sud. En parallèle, Steven Soderbergh n’oublie pas de jouer sur la carte émotionnelle en nous racontant les déboires d’un personnage fictionnel, une retraitée très middle class qui fait office de dommage collatéral dans cette affaire. Plusieurs saynètes humoristiques bien que souvent pathétiques mettent en scène en parallèle des protagonistes des Panama Papers, dont, au-delà des fameux avocats Jürgen Mossack et Ramón Fonseca Mora, le célèbre homme d’affaire britannique Neil Heywood, assassiné dans des conditions troubles et interprété de manière assez convaincante par Matthias Schoenaerts.
Il faut dire que le casting est un atout indéniable de The laundromat : l'affaire des Panama Papers. Évidemment, on ne peut éviter de mentionner la prestation de Meryl Streep, encore une fois exceptionnelle. Elle s’empare de ce rôle qui ne la met pas forcément en valeur et déploie comme souvent ses talents de travestissement avec une joie visiblement non dissimulée. Elle parvient à faire passer malgré tous ces artifices une palette d’émotions et à rendre crédible son personnage. En plus des prestations exagérées mais jubilatoires de Gary Oldman et d’Antonio Banderas, on éprouve beaucoup de plaisir à revoir David Schwimmer ou bien Sharon Stone, pour un excellent cameo. On sent que Steven Soderbergh, à l’aise dans les films choraux, s’amuse à jouer avec le second degré pour pointer du doigt les travers d’une société ultra capitaliste qu’il n’hésite pas à critiquer.
La légèreté se retrouve aussi dans la mise en scène élégante de The laundromat : l'affaire des Panama Papers. Steven Soderbergh parvient à trouver des petites subtilités quasiment pour chacune des scènes, jouant sur les cadres et les mouvements de caméra et trouvant des petites astuces qui nous montrent qu’il n’a pas perdu de sa verdeur. Le scénario est, mine de rien, intelligent, parvenant à nous faire comprendre, sans rentrer trop loin dans les détails de l’affaire, une mécanique compliquée et opaque. Les dialogues sont souvent caustiques, le réalisateur n’hésitant pas par exemple à se mettre lui-même virtuellement en porte-à-faux, l’une des répliques désignant le concepteur du film comme complice des Panama Papers. La scène finale est d’ailleurs habile, mettant en évidence les faux semblants du cinéma et terminant avec une jolie pirouette un film qui ne se prend pas la tête et parvient à son but.