Collision (2004) Paul Haggis
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Collision (2004) Paul Haggis
Violence des échanges en milieu urbain
Pour sa première réalisation, le scénariste de Million dollar baby signait un film chorale speedé dans la Cité des anges. Récompensé par le Grand Prix du festival de Deauville, Collision nous trace le parcours d'une dizaine de personnages, d'un procureur qui délaisse son épouse à un réalisateur un peu couard en passant par un policier raciste et son coéquipier idéaliste. Il s'inspire vaguement, pour le point de départ du scénario, d'un vol de voiture dont il a été victime, assorti de menaces et autre violence. Pour la petite histoire, Paul Haggis rentrait chez lui après avoir assisté à la première du Silence des agneaux. Le film a été récompensé par un Oscar, dans une compétition suspectée d'homophobie, le favori étant Le secret de Brokeback Mountain.
Le début
Anthony et Peter, deux jeunes hommes noirs, effectuent un vol armé sur le procureur Rick Cabot et son épouse Jean dans leur voiture. Alors que les hommes s’éloignent dans le SUV, Peter met une figurine de Saint Christopher, le saint patron des voyageurs, sur le tableau de bord. Ils passent devant l’inspecteur Graham Waters et sa partenaire Ria, qui enquêtent sur un homicide dans un parking de la vallée de San Fernando. Ils apprennent qu’un policier blanc, l’inspecteur Conklin, a tiré sur un policier noir, l’inspecteur Lewis, sans savoir que l’autre était un policier. Rentré chez lui, Cabot dit que l’incident pourrait lui coûter sa réélection, car peu importe avec qui il se rangera, il perdra soit le vote des Noirs, soit le vote de l’ordre public.
Analyse
Le thème qui sous-tend Collision est le racisme, vécu au quotidien par ce mélange de cultures qui forme l'Amérique post 11 septembre. Le traitement est d'ailleurs assez habile, le problème est analysé sous toutes ses coutures et évite miraculeusement les clichés qui pourraient plomber l'intrigue. Les personnages, complexes, sont à la fois victimes et bourreaux dans cette dérive sécuritaire qui s'installe peu à peu aux États-unis. Il est d'ailleurs assez rare de voir un film critiquer de front ce système et proposer une vision aussi triste d'un rêve américain qui manifestement n'existe plus. Vingt ans plus tard, on ne peut d'ailleurs pas dire que la situation se soit améliorée.
Personne ne sort indemne d'un film qui semble sonner la sonnette d'alarme pour faire réagir les spectateurs, en particulier aux États-Unis. L'idée de faire le bilan d'une société en état de choc est certes intéressante, mais il faut avouer que les intrigues trop nombreuses de Collision finissent par nous embrouiller. Le long-métrage réalisé par Paul Haggis brasse une flopée de thèmes et de situations, quitte à bâcler quelquefois les intrigu es et à nous laisser sur notre faim. Le genre est en effet plutôt casse-gueule, et tout le monde n'a pas forcément le talent d'un Paul Thomas Anderson, version Magnolia, ou d'un Robert Altman, qui maîtrisait cette figure de style à la perfection.
On a un peu l'impression que le réalisateur a eu peur d'assumer pleinement quelques histoires pourtant riches mais qui auraient dû être développées. Le goût d'inachevé reste encore quand on voit le potentiel qu'aurait pu tirer Paul Haggis d'un casting peu homogène mais qui réserve de bonnes surprises. Des rôles à contre-emploi pour le trop rare Matt Dillon ou pour un Ryan Philippe qui s'affine avec le temps, se révélant tout aussi beau gosse, de la profondeur en plus. Côté féminin, notons une fine interprétation de la craquante Thandie Newton, et la présence un peu inutile de la peu charismatique Sandra Bullock. Tout ceci mériterait plus que les quelques miettes de scénario qu'on leur propose dans Collision.