Rocco et ses frères (1960) Luchino Visconti
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Rocco et ses frères (1960) Luchino Visconti
Family business
La carrière de Luchino Visconti a débuté avec le mouvement néo-réaliste. Ce sont des films comme Les amants diaboliques et La terre tremble qui vont le faire connaître dans les années quarante. Déjà dans ce dernier Visconti suivait la destinée d’une famille modeste, des pêcheurs. Dix-huit ans plus tard il va reprendre cette même thématique de la chronique familiale, en suivant toujours une famille modeste dans Rocco et ses frères.
Ici la famille vient du sud de l’Italie et débarque en train à Milan. Ils rejoignent l’aîné, Vincenzo, qui fête ce soir là ses fiançailles avec la bellissima donna qu’est Ginetta (Claudia Cardinale, d’une beauté à faire fondre un iceberg). La mamma Rosaria se voit déjà vivre aux crochets de son fils aîné mais la belle-famille ne l’entend pas de cette oreille. Rocco, sa mère et ses quatre frères vont donc cohabiter dans un appartement miteux et voient d’un très bon œil l’arrivée des premiers flocons de neige à déblayer, synonyme d’embauche pour les courageux travailleurs qu’ils sont.
Et là ce n'est que le résumé du tout début : c’est dire s’il s’en passe des choses dans ces pratiquement trois heures que dure Rocco et ses frères. Comme à son habitude, Luchino Visconti dresse une épopée flamboyante, ici dédicacée aux humbles, aux nantis. Point de misérabilisme pour autant : Rocco et ses frères sont fiers comme des latins et ne s’encombrent pas de jérémiades.
Et Luchino Visconti filme dans Rocco et ses frères les couches populaires comme il filme l’aristocratie en fin de règne. D’abord la montée en puissance, les années de dure labeur qui finissent par payer : Simone devient boxeur professionnel, Rosaria se fait appeler Madame. C’est là qu’apparaît Nadia, qui va se mettre entre Rocco et Simone, entre le pur et le dur, le bon et la brute. L’affrontement biblique peut enfin commencer, et avec lui la déchéance de la famille Parondi.
Encore une fois, c’est une femme qui va mettre le feu aux poudres de Rocco et ses frères, qui va faire parler la violence trop longtemps contenue. Même Cecchi ne pourra rien y faire, le sacrifice de Rocco est lui aussi inutile : rien n’arrête les forces du destin. Comme dans Le guépard la chute sera inéluctable, mais la morale finale gardera un léger espoir, dans les yeux du jeune Luca et dans ces visages d’ouvriers à l’usine. Luchino Visconti marxiste, qui l’eût cru, et pourtant…
Découpé en quatre parties pas toujours homogènes Rocco et ses frères renoue avec le discours néo-réaliste en y ajoutant superbement une touche de romanesque, un souffle épique. Et puis voir Alain Delon et Annie Girardot en couple de jeunes premiers, c’est quand même pas si mal.