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O fantasma (2000) João Pedro Rodrigues

O fantasma (2000) João Pedro Rodrigues

Publié le 2 juil. 2023 Mis à jour le 2 juil. 2023 Culture
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O fantasma (2000) João Pedro Rodrigues

J'veux du queer

Présenté au Festival de Venise en 2000, O fantasma a mis en lumière, pour son premier film, le talent d'un réalisateur portugais qui refera parler de lui. Car cinq années plus tard João Pedro Rodrigues signera Odete, sélectionné à la Quinzaine des réalisateurs du Festival de Cannes. Puis en 2009 c'est Mourir comme un homme qui sera présenté à la section Un certain regard, tandis que sortit en 2012 La dernière fois que j'ai vu Macao, qu'il a coréalisé avec Joao Rui Guerra da Mata, puis en 2016 L'ornithologue, et en 2022 Feu follet, présenté à la Quinzaine des réalisateurs. Son cinéma composé de diverses figures LGBT – gays, transgenres... - est hanté par les fantômes et les amours contrariées. Il a réussi, au bout d'une vingtaine d'années de carrière, a imposer non seulement un nom, portugais de surcroît, mais également un style, au cinéphiles. Il fait aujourd'hui partie des cinéastes qui comptent, et cela sans démériter.

Le début

Un jeune homme vêtu de latex, Sergio, serre le bâillon d'un homme nu et menotté, puis on le voit nourrir un chien errant dans la rue. Fatima le rejoint et lui met les mains sur les yeux. Intrigué, il ne la reconnaît pas tout de suite. Puis il promène son chien et tombe sur une voiture abandonnée. À l'intérieur se trouve un policier ligoté et bâillonne. Sergio le caresse, met la main dans son pantalon et dans son slip. Il le masturbe et le suce, l'amenant progressivement à la jouissance. Regardant sa montre, il se rend alors compte qu'il est en retard pour le boulot. Il rejoint ses collègues éboueurs et reçoit ses instructions de son chef. Ils montent ensemble sur leur camion et commencent leur journée de travail. Dans un garage ils rencontrent Joao, qui devient avec sa moto un objet de fantasmes pour Sergio. Mais sa journée n'est pas terminée pour autant.

Analyse

Le sentiment qui qualifie le plus justement O fantasma est sans aucun doute le désir. Le film est traversé par des fulgurances d’appétits charnels, mais pas seulement. Car le fétichisme traverse le long-métrage, par l'intermédiaire de son personnage principal. Celui-ci est obsédé non seulement par le corps des hommes, mais également par de multiples objets et autres matières. Ses besoins sexuels semblent inextinguibles et la caméra ne rate aucun de ses regards obliques destinés à attirer l'attention afin d'assouvir toutes ses pulsions. Objet de nombreux désirs, Sergio en assouvit quelques-uns, et en imagine bien d'autres. C'est que le titre en portugais signifie à la fois fantasme et fantôme, ce qui peut prêter à de nombreuses interprêtations quant à la dimension onirique de bien des séquences, et apporte au film un aspect fantastique non déplaisant.

Toutefois, le metteur en scène ne triche alors pas pour nous montrer les scènes de sexe explicites, quelquefois même en plans rapprochés. Interdit aux moins de seize ans à sa sortie française, il a souvent été cité comme possédant en son sein une scène de fellation non simulée. Le garçon, personnage principal à la fois attirant et inquiétant, se tourne aussi, dans la traque de l'objet de ses fantasmes, vers un slip qu'il renifle aisément ou une combinaison en latex qui lui sied assurément. Bref, si O fantasma est devenu, dès sa sortie, et cela s'est amplifié avec le temps, un film culte pour certains, c'est qu'il cristallise en quelque sorte une culture. En l'occurrence, le film possède nombre des attributs de la culture queer, qui, si tant est que l'on voudrait la définir, se trouverait comme un mélange de cultures partagées par des minorités sexuelles et de genre.

Premièrement l'acteur principal de O fantasma est jeune et sexy en diable, envoûtant la caméra par sa démarche et son magnétisme. Il est d'ailleurs étonnant que l'on ait plus entendu parler de Ricardo Meneses, qui, 18 ans à l'époque, crève l'écran dans ce rôle pourtant ardu. Ensuite, l'histoire évoque sans ambages à la fois les désirs bruts que ressentent, et qu'assouvissent, les protagonistes, hommes, entre eux, mais aussi les amours contrariées d'un adolescent, thématique classique pour les membres d'une communauté bien souvent frustrés, quand ils ne sont pas harcelés. Mais il ne faudrait pas non plus cantonner le film à cette étiquette : l'esthétique de João Pedro Rodrigues, très étudiée, prouve qu'il existe un créneau pour les films aux thématiques gays et aux prétentions artistiques. Son ambiance morbide et ô combien fascinante finira de convaincre les plus sceptiques.

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