Wonder woman (2017) Patty Jenkins
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Wonder woman (2017) Patty Jenkins
Girl power
Le personnage principal de Wonder woman apparaît dans un comic book au début des années 1940 ; considérée comme l'une des premières super-héroïnes, elle va être popularisée par la série des années 1970 dont l'actrice Lynda Carter sera la figure de proue. Si on la retrouve dans des dessins animés, elle n'intervient au cinéma qu'en 2016, dans le film de Zack Snyder, Batman vs Superman, l'aube de la justice. La production du long-métrage fut houleuse, les scénaristes valsant au gré du temps : les premières ébauches du projet datent de la fin des années 1990. Quand le projet est relancé et commence à prendre forme, une réalisatrice de séries est annoncée pour le mettre en scène, bientôt remplacée par Patty Jenkins. Celle-ci avait réalisé le très remarqué Monster en 2003, qui avait consacré Charlize Theron, puis avait principalement travaillé pour la télévision. À la surprise de nombreux cadres exécutifs de la Warner, le film fut un succès à sa sortie, ce qui laissa le champ libre à une suite.
Devant le Louvre, un employé de la Wayne Entreprises sort d'un camion avec une mallette, qu'il confie à Diana à l'intérieur du musée. Elle y découvre une vieille photo la mettant en scène avec une tiare autour de la tête, quatre hommes l'entourant. Un mot l'accompagne, encourageant la jeune femme à raconter son histoire. Elle se rappelle alors son enfance, dans une cité nichée dans les montagnes, au milieu d'une île invisible. Elle imitait régulièrement les gestes des Amazones, avec qui elle vivait, et qui s'entraînaient au combat en vue d'une invasion, en ayant hâte de commencer son entraînement. Un soir, sa mère lui raconte l'histoire de son peuple, dont l'origine remonte aux temps anciens, où seuls les dieux régnaient et où Zeus était leur maître. Il créa l'Humanité mais son fils Ares, jaloux, les rendit jaloux et ainsi fut créée la Guerre. Puis les dieux ont créé les Amazones pour ramener la Paix sur Terre. La reine des Amazones mena alors une révolte qui les libéra de l'esclavage, ce qui amena la Guerre des Dieux.
Ce qui frappe dans le traitement de Wonder woman est le mélange des genres que le film manie assez facilement. Il s'ouvre dans un cadre parisien contemporain, élément qui ne sera d'ailleurs jamais exploité par la suite. Car on bascule très rapidement sur un long flash-back qui nous amène à une esthétique de péplum, où la mythologie a une part essentielle. Cela tient à la nature même du personnage, qui apporte ainsi la touche « super-héroïne », elle-même inspirée des Amazones des récits antiques. Puis on bascule dans un récit mêlant le film de guerre et le film d'espionnage, mâtiné de comédie romantique, comme le concoctaient de nombreux films américains des années 1940. On ne s'attend pas vraiment, dans le cadre d'un blockbuster de chez DC Comics à un tel mélange, et pourtant la sauce prend bien. La réussite de l'exercice tient sans doute du fait que Patty Jenkins aborde visiblement tous ces éléments avec légèreté, instillant une dose d'humour appréciable à son récit.
Mais le tour de force de Wonder woman est certainement le regard féministe apporté dans un univers de comics dominé par des figures masculines. Rare sont en effet les super-héroïnes a avoir eu droit à leur adaptation cinématographique : on peut compter sur Supergirl en 1984, puis Catwoman et Elektra au début des années 2000. Les trois films furent des échecs au box-office qui ne rassurèrent pas les financeurs, ce qui est une clé d'explication pour les difficultés que connut la production du film. Or, la vague « me too » a peut-être été un élément favorisant le succès de cet opus, qui n'hésite pas à mettre en avant un discours féministe. Fidèle à l'origine du comic book, Patty Jenkins fait grandir son personnage principal dans une île peuplée de femmes fortes, qui se battent et ont pour mission de protéger l'humanité. Par la suite, Diana ne va pas hésiter à se confronter au machisme d'une époque où pour exemple les femmes n'étaient pas admises dans de nombreux lieux de pouvoir.
Le parallèle avec la société d'aujourd'hui est assez évident, et ce n'est pas le seul brouillage des pistes temporelles que Wonder woman effectue, volontairement ou non. Le film est parsemé d'anachronismes principalement dû à son but d'efficacité, mais qui peuvent dérouter. Ainsi alors que DC Comics avait créé son personnage en 1941, l'intrigue principale du film de Patty Jenkins se situe à la fin de la Première guerre mondiale. Or de nombreuses scènes de batailles semblent incohérentes par rapport aux techniques de l'époque, et ne servent visiblement qu'à apporter une touche de spectaculaire nécessaire à tout film de super-héro, fut-elle une héroïne. C'est là où le discours est ambivalent : Diana King se mesure certes d'égal à égal à ses comparses masculins, mais elle semble devoir plus que ceux-ci user de ses charmes pour arriver à ses fins. Les scènes d’essayage de vêtement ou de séduction sur la piste de danse semblent à ce titre superfétatoires, et desservent un peu le propos d'un film pourtant intéressant.