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La fabrique du consentement: regards lesbo-queer (2021) Mathilde Capone

La fabrique du consentement: regards lesbo-queer (2021) Mathilde Capone

Publié le 29 mai 2021 Mis à jour le 31 mai 2021 Culture
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La fabrique du consentement: regards lesbo-queer (2021) Mathilde Capone

Tu veux ou tu veux pas ? 

Ce qui a initié la production de La fabrique du consentement : regards lesbo-queer, ce sont des entretiens. Mathilde Capone a eu treize conversations, au Québec et en France, puis a proposé à seize actrices et acteurs de rejouer ces dialogues, qui ont ensuite été sélectionnés et assemblés. Entre ces paroles, exprimées le plus souvent face caméra, des marionnettes à têtes animales reconstituent des scènes et des dessins illustrant certaines des paroles qui sont exprimées. Auto-produit par cette militante et anthropologue qui a entre autre travaillé sur le concept de violence systémique, le film s’articule autour du consentement. Récemment mis en lumière par l’ouvrage de Vanessa Springora, ce terme est utilisé depuis longtemps dans de nombreux milieux, qu’ils soient féministes ou BDSM (autrement dit bondage, discipline, domination, soumission, sado-masochisme), et n’est pas toujours bien perçu, le documentaire en apporte une approche pédagogique. Il est disponible du 25 mai au 1er juin sur la plateforme MK2 Curiosity, dans une programmation de films LGBTQI&+++ en préambule du Festival Chéries Chéris, où on pourra le voir le 30 juin et le 6 juillet.

Plusieurs personnes donnent leur définition du consentement et de sa nécessité. Il permet non seulement d’éviter les agressions mais aussi de passer des moments agréables, de poser des limites mais aussi d’exprimer ses envies ou ses besoins. C’est aussi une question de parole, de communication entre partenaires, de s’autoriser à changer d’avis. C’est un concept changeant, qui ne s’applique pas forcément qu’à la sexualité, et qui n’est pas toujours binaire. La complexité de cette notion amène certaines ou certains à avoir des relations sexuelles sans forcément en avoir envie en tant que tel mais pour faire plaisir à son partenaire. Le principal argument qui permet de tracer une frontière avec un acte subit devrait être la coercition ou son absence, la conscience de vouloir faire plaisir quitte à parfois se forcer. Apprécier un moment de plaisir partagé mutuellement verbalisé est un apprentissage qui ne va pas immédiatement de soi mais qui nourrit une relation.

En un peu plus d’une heure, La fabrique du consentement : regards lesbo-queer reprend et résume l’ensemble des problématiques associées au consentement. Le documentaire s’attache en premier lieu à définir le terme : consentir c’est certes accepter, encore faut-il qu’il y ait réciprocité. Le consentement est donc abordé en opposition avec l’agression, mais la réalité est bien entendu plus complexe. Un des enjeux clés que les intervenantes et les intervenants évoquent est la violence, puisque celle-ci n’est pas obligatoirement subie. Ainsi, deux protagonistes d’une relation sont tout à fait à même de consentir à une certaine forme de violence, quitte à déterminer à l’avance son intensité, et contrairement aux idées reçues, les enseignements du BDSM apportent un éclairage pertinent sur cette question. Encore une fois, la communication est la valeur indispensable et trop souvent négligée dans un rapport.  Par contre l’œuvre de Mathilde Capone n’aborde qu’en creux un des aspects actuellement les plus conflictuels de la notion de consentement, à savoir à partir de quand on est en mesure d’opérer ce choix.

Sur le fond, on se rend bien compte de l’importance des propos échangés dans La fabrique du consentement : regards lesbo-queer, ainsi que de leur actualité. La forme du documentaire de Mathilde Capone est quant à elle relativement classique, et donc principalement composée d’entretiens, ou plutôt de monologues en frontal. La réalisatrice ne manque cependant pas de s’amuser avec son dispositif, apparaissant parfois dans le cadre et nous montrant ça ou là les protagonistes sortant leur texte pour le relire ou s’en souvenir. Si le propos est pesant, l’ambiance est décontractée et des rires émaillent avantageusement les scènes. L’idée de ponctuer tous ces propos par des illustrations, qu’elles soient des dessins ou du théâtre de marionnettes, apporte un côté un peu naïf à l’ensemble et permet encore une fois d’alléger le procédé filmique. On ne sombre jamais dans le voyeurisme et bien que les paroles soient parfois crues, leurs représentations ne sont aucunementgraveleuses.

L’apport indéniable de La fabrique du consentement: regards lesbo-queer réside dans la deuxième partie de son titre. Le documentaire assume complètement son parti-pris, à savoir celui d’interroger des personnes queer sur la question du consentement.Ce sujet est habituellement majoritairement traité sous l’angle de la culture hétérosexuelle dominante, et il y a déjà beaucoup de choses à dire à ce titre. Mais cela n’empêche pas de se décentrer, et d’observer ce phénomène du point de vue de lesbiennes, de bisexuelles ou de personnes transgenres, en particulier lorsqu’elles ou ils sont racisé-e-s. La problématique est alors parfois complexifiée, et amène à se rendre compte que les violences ne sont pas uniquement perpétrées par la gent masculine. Par exemple, le documentaire permet de mettre en avant le fait que certaines personnes MtoF (male to female) sont parfois discriminées dans les communautés LGBTQI en raisons du genre qui leur a été assigné à la naissance, et de la présomption de violence qui lui est inconsciemment associée.

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