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L'enfance nue (1968) Maurice Pialat

L'enfance nue (1968) Maurice Pialat

Publié le 24 déc. 2021 Mis à jour le 24 déc. 2021 Culture
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L'enfance nue (1968) Maurice Pialat

L’enfance de l’art

Tout le cinéma de Maurice Pialat est en germe dans ce premier long-métrage. Le tournage de L’enfance nue fut extrêmement difficile, le réalisateur se disputa avec nombre de ses collaborateurs, François Truffaut (ici producteur) le premier. L’idée de départ était de réaliser un documentaire sur les enfants de l’assistance publique (l’actuelle aide sociale à l'enfance). Pialat remanie de nombreuses fois le scénario et fait appel à Arlette Langmann pour finalement peaufiner une trame de fiction inspirée des expériences des protagonistes.

Le jeune François a dix ans et n'a jamais connu son père. Ne parvenant pas à l'élever, sa mère l'a confié à l’Assistance publique. Il se retrouve dans une famille de Lens, les Joigny, qui ont une fille, Josette, qu'ils mettent clairement en avant dans leur éducation. En manque d'amour, François ne leur rend pas la vie facile et se montre violent, jusqu'à ce qu'ils craquent et le rendent à l'institution. Puis il est confié aux Therry, deux retraités vivant dans le Nord. Auprès de « Pépère » et de « Mémère » vivent également deux enfants de l'Assistance, Raoul, qui a 15 ans, et la petite Valérie.

Dès L'enfance nue, Maurice Pialat  a fait appel à des acteurs non professionnels pour incarner tous les personnages de son film. Il choisit le ton du « cinéma vérité », où l’émotion sourd de ces petits moments du quotidien. Ainsi François est un gosse, qui, à dix ans, a été ballotté de famille d’accueil en famille d’accueil. Sans aucun repère, et clairement en recherche d'affection en permaence, il finit petit à petit par agacer ses parents d’accueil à tel point qu’ils finissent tous par en avoir assez et rendent l’enfant à l’Assistance publique qui le renvoie d'une famille à une autre.

Le portrait qui se dégage du film est celui d’un artiste sans concession, qui refuse le compromis et pousse ses collaborateurs dans leurs retranchements pour en extraire le meilleur. Maurice Pialat ne cherche sans doute pas à créer des ambiances tyranniques sur ses plateaux de tournage par simple caprice : il est en quête d’absolu et considère qu’il ne peut l’atteindre que par ce biais. Force est de constater que sur L’enfance nue le résultat est assez bluffant. Il présente les événements avec une grande rigueur, sans aucun pathos, sans parti pris.

Seule la réalité des faits, mis bout à bout, laisse transparaître une émotion vraie et simplement humaine, qui touche profondément. François n’est pas un mauvais bougre : il est simplement un enfant de dix ans turbulent qui manque de cadre et finit toujours au mauvais endroit au mauvais moment. Les parents du début de L'enfance nue, s’ils sont exécrable dans leur façon de parler d’un enfant comme s’il s’agit d’un produit de consommation courante, n’ont semble-t-il pas le recul nécessaire et sont eux aussi des victimes pauvres d’une société en crise.

Par comparaison, les simples moments d’humanité qui nous sont montrés dans L'enfance nue, lors de ces scènes de mariage ou d’intimité avec « Pépère » et « Mémère » sont d’autant plus touchants qu'ils sont simplement gratuits, uniquement là pour nous faire partager le quotidien, parfois pathétique, parfois sublime, de ces laissés-pour-compte de la société. C'est une exigence et une intégrité que Maurice Pialat conservera tout au long de son œuvre, au grand dam de ses détracteurs et pour le plus grand plaisir de ses admirateurs.

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