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L'armée des douze singes (1995) Terry Gilliam

L'armée des douze singes (1995) Terry Gilliam

Publié le 25 oct. 2022 Mis à jour le 25 oct. 2022 Culture
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L'armée des douze singes (1995) Terry Gilliam

Vol au-dessus d’un nid de singes

C’est un court-métrage français datant de 1962 qui inspira à Terry Gilliam son Armée des douze singes. Qui a vu La jetée de Chris Marker comprendra aisément ce qui poussa Gilliam dans cette variation sur le même thème. C’est une œuvre non seulement révolutionnaire mais surtout qui ne laisse pas insensible le spectateur. Uniquement constitué de photos assemblées les unes après les autres, le court-métrage raconte une histoire d’amour éternelle sur fond de troisième guerre mondiale, l'histoire d'un homme qui doit retourner dans le temps pour sauver un reste d’humanité. Gilliam garde cette trame sublime et la travaille au corps pour en faire un long-métrage élégant et haletant. Comme pour la plupart des films du réalisateur, le tournage est épique, mais il parvient à respecter les contraintes du studio, tout en ayant réussi à négocier quelques éléments pour lui essentiels, notamment le final cut. À sa sortie, le film est un relatif succès public et critique, décrochant en prime deux nominations aux Oscars.

Le début

En 1996, 5 milliards d’êtres humains ont été tués par un virus inconnu, et les rares survivants sont reclus dans des sous-sols afin de limiter la propagation des infections. Quarante ans plus tard, la situation ne s’est pas vraiment améliorée, et des programmes scientifiques tentent de percer à jour les mystères de l’origine de la maladie. Ils prennent pour cobaye des prisonniers, leur faisant voyager dans le temps afin de recueillir des informations et de rapporter des prélèvements d’une époque où le virus n’avait pas encore muté. Ainsi, James Cole est choisi pour trouver le plus d’informations possibles sur une organisation écologiste supposée terroriste, dénommée L’Armée des douze singes. Ce prisonnier, qui n’a pas vraiment le contact facile, est de plus en plus hanté par un rêve récurrent, celui d’un homme tué par balle dans un aéroport, sous les yeux d’un enfant et d’une femme belle et mystérieuse. Les scientifiques lui promettent de lui rendre sa liberté s’il réussit sa mission.

Analyse

On peut considérer que L’armée des douze singes est peut-être le plus cohérent des films de Terry Gilliam. Renonçant à son univers baroque de Brazil et à ses délires narratifs habituels, il se contente d’étirer le scénario de son film et de le mener implacablement vers son dénouement. Bien sûr, c’est un film de science-fiction, ce qui autorise l’auteur à des trouvailles imaginatives fantasques, mais elles restent de bout en bout presque logiques, en tout cas elles servent toujours le récit, il n’y a pas ou peu de digression. La seule part onirique du film est justement ce qui fait le cœur de l’intrigue, elle-même tendant peu à peu à dénouer les fils de ce rêve récurrent que fait James Cole. L’intrigue du film est malgré tout très complexe, mais ne déstabilise pas le spectateur. Évidemment, il vaut mieux le voir plusieurs fois pour mieux comprendre tous ses ressorts dramatiques, mais même en voyant le long-métrage pour la première fois on n’est pas perdu dans les méandres du scénario. 

Au contraire, on se laisse guider par le réalisateur exactement où il veut nous amener, découvrant les fausses pistes et les indices au rythme des personnages. L’ambiance apocalyptique du début du film fait froid dans le dos et l’univers aseptisé du rêve de James contraste parfaitement avec l’atmosphère poussiéreuse dans laquelle baigne le reste de L’armée des douze singes. Les cinéphiles se régaleront des petits clins d’œil qui émaillent le film, de Monkey business aux films d'Alfred Hitchcock, tandis que les amatrices et les amateurs pourront apprécier les fessiers de Bruce Willis et de Brad Pitt. Ces deux acteurs joue une partition très convaincante, en particulier Brad Pitt dans un de ses meilleurs rôles. Toujours aux frontières de la folie pure, il livre une performance d’acteur assez hallucinante. Quant à Bruce Willis, il se laisse doucement envahir par le doute et son histoire d’amour avec la charmante Madeleine Stowe nous rassure : non il n’est pas qu’une machine à sauver l’humanité. 

On peut voir L’armée des douze singes comme un voyage aux confins de l’aliénation : sommes-nous tous fous, ou est-ce la société de consommation qui essaye de nous le faire croire ? Jusqu’où peut-on aller pour l’amour de la planète et des animaux ? Comment réguler les avancées scientifiques ? Qui sommes-nous réellement ? Pouvons-nous échapper à notre propre destin ? Tant de questions posées par Terry Gilliam, qui a le bon goût de ne pas nous livrer de réponse définitive et péremptoire. On peut aussi apprécier la réflexion ébauchée par le long-métrage au sujet de l’engagement à la cause écologiste, qui, d’année en année se fait de plus en plus prégnante. Le virus qui affecte l’ensemble de la population n’est pas sans rappeler les diverses catastrophes sanitaires récentes, et les débats médiatiques autour de la responsabilité des uns ou des autres ne rend la portée du film que plus grande. Mais on peut aussi tout à fait voir le film comme un pur moment de divertissement, qui plus est brillamment réalisé.

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