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Adieu les cons (2020) Albert Dupontel

Adieu les cons (2020) Albert Dupontel

Publié le 23 mai 2021 Mis à jour le 24 mai 2021 Culture
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Adieu les cons (2020) Albert Dupontel

Quelques grammes de finesse dans un monde de brutes

Le précédent film d’Albert Dupontel, Au revoir là-haut, sonnait un peu comme un pas de côté dans sa filmographie. Il adaptait alors le roman de Pierre Lemaître et obtenait plusieurs Césars, dont celui de la meilleure réalisation. Trois ans plus tard, il récidive avec Adieu les cons, s’octroyant également celui du meilleur scénario original. Il revient ici à ses premières amours, lui qui avait au milieu des années 1990 secoué le cocotier du paysage cinématographique français avec Bernie et son personnage complètement barré mais tellement attachant. Dès lors, le réalisateur n’aura de cesse de pointer du doigts les ratages d’une société dont les dérives sécuritaires ne cessent d’augmenter. Il s’entoure d’une troupe fidèle, dont la magnifique actrice Claude Perron ou le non moins formidable Nicolas Marié, jouant sur l’absurde des situations et le côté iconoclaste des personnages. Inspiré par les comédies burlesques, il invente un univers peu banal et drôlement attachant.

Dans un cabinet, un médecin regarde une série d’IRM et de scanners, prenant des notes avec son dictaphone sur un cas d’insuffisance respiratoire avancé. Il demande à sa patiente, Suze Trapé, qui tousse du sang dans un mouchoir, ce que ces images évoquent pour elle. Il s’étonne qu’elle les trouve jolies et lui fait comprendre maladroitement la gravité de sa condition physique. Comprenant qu’il n’y a pas de traitement, et qu’il ne lui reste pas beaucoup de temps à vivre, elle part en courant. De son côté, monsieur Cuchas, responsable de la sécurité dans une administration, est convoqué par son chef de service. Alors qu’il lui explique le projet de réorganisation des services sur lequel il travaille, on lui annonce que cette tâche va être affecté à des jeunes sortants d’école qu’il devra former. Voyant que la promotion qu’il attendait depuis longtemps lui échappe, il s’enfuit. Dans son salon de coiffure, Suze rassemble toutes ses affaires et se souvient de sa jeunesse.

Dans le fond, Adieu les cons n’est pas bien gai. Son personnage principal masculin est un homme à qui l’on fait comprendre qu’il est trop vieux pour la promotion qu’il espérait et qui, du coup, fait une tentative de suicide. Son personnage principal féminin est quant à elle gravement malade et n’a plus beaucoup de temps à vivre. Elle a accouché sous X trente ans auparavant et n’a jamais réussi à reprendre contact avec l’enfant qu’elle a mis au monde, malgré les diverses tentatives qu’elle a menées. Ajoutons à cela un troisième larron aveugle, que l’on a relégué au service des archives, isolé dans une pièce sans lumière Ceci ne fait que débuter le film, qui se déroule dans une société où la sécurité et la police sont omniprésents et emploient des méthodes que l’on peut qualifier de violentes. C’est un univers gris, peuplé de fantômes, ce qui est joliment mis en valeur dans une scène où seule Virginie Efira porte un vêtement rouge parmi une foule aux tenues sombres.

Cependant, Adieu est les cons parvient à sublimer ces éléments négatifs, à faire rire et à émouvoir les spectateurs. Comme à son habitude, Albert Dupontel carbure à l’absurde et au décalage, tant dans le propos que dans la forme. S’il met en avant cette société uniforme, c’est avant tout pour en relever ses dysfonctionnements et nous alerter sur la standardisation qui menace au quotidien de nous enfermer dans nos habitudes, dans nos préjugés. Comme à son habitude, il utilise tous les ressorts de la comédie burlesque et les mécanismes de son humour cartoonesque font mouche. Ses gags relèvent autant d’une mise en place à la Tex Avery que de situations ubuesques comparables aux Monthy Python. Il offre d’ailleurs en guise de clin d’œil un cameo à Terry Gilliam et à Jackie Berroyer un rôle à sa mesure, mutin et doux. Si l’histoire est rocambolesque et improbable, on ne s’ennuie pas une seconde, le rythme étant maintenu du début à la fin.

Et au milieu de tous ces moments de franche rigolade, on est soudain happé par une émotion sincère. Avec sa naïveté assumée, Adieu les cons nous rappelle la force du lien humain. C’est du simplicité confondante, et pourtant ça fonctionne très bien. Si l’on y croit autant, c’est sans doute lié au talent des interprètes qui, loin de la surenchère, fournissent des prestations de qualité. On ne dira jamais assez combien Virginie Efira se bonifie avec le temps, tandis qu’Albert Dupontel parvient à être juste tout en versant parfois dans la surenchère. Il trace ainsi un sillon inédit dans le cinéma français, se permettant des fantaisies improbables (tenir une scène sur des ascenseurs qui montent et qui descendent) et des moments de grâce dont les dialogues sont pourtant à la limite de la niaiserie. Mais on en redemande, et on se dit que l’on n’a pas si souvent devant nos yeux ces espaces de poésie bon enfant, qui font du bien et qui nous rappellent l’essentiel.

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Commentaires (2)

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Florence Oussadi il y a 3 ans

Il y a une scène dans ce film que j'ai particulièrement aimée c'est celle où Nicolas Marié décrit à Virginie Efira le quartier dont il se souvient sauf que tout a fermé ou a été remplacé par des immeubles sans âme. Dupontel s'inscrit dans la filiation de Terry Gilliam mais dans cette scène il m'a fait penser au "Playtime" de Tati avec ces reflets sur les vitres montrant des façades uniformes de tours de bureaux en lieu et place de l'univers familier à taille humaine.

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Jean-Philippe Rathle il y a 3 ans

Oui, c'est une jolie scène. Et en effet, Albert Dupontel ne renierait sans doute pas l'héritage de Jacques Tati

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