Le Vagabond
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Le Vagabond
Le Vagabond. C’est ainsi que les gens du pays surnomment cet homme si énigmatique. Cet étranger qui parcourt notre contrée en quête de je ne sais quel trésor. Toujours accompagné de son fidèle arc, une arme magnifiquement sculptée dans un bois sombre, presque noir, ornée de symboles insolites. Probablement des runes enchantées destinées à le protéger. Certains racontent qu’à chaque flèche qu’il décoche, il chuchote des mots qu’on ne peut comprendre et que, soudain, une douce lumière bleutée illumine chacun des signes. Mythe ou réalité ? Cela reste un mystère pour moi.
Hier, il a franchi le seuil de mon auberge. Il n’a rien dit. Pas un bonjour. Pas un bonsoir. Il est directement allé s’installer sur la table la plus reculée, celle plongée dans l’obscurité. Et d’un simple signe de tête, il me commanda une bière. Sans jamais prononcer un mot. Et pourtant, je sus exactement ce qu’il désirait.
Quand je posai une pinte mousseuse devant lui, il m'offrit un sourire. Un sourire séducteur, presque envoûtant. Il était aussi beau que singulier. Sa peau dorée par le soleil. Ses yeux d’un vert si intense qu'ils semblaient briller dans le noir. Ce regard empli de mystère… et cette mèche brune qui tombait négligemment sur son front. Je ne suis pas de celles qui se pâment devant un joli minois, mais je dois bien avouer que cet homme possédait un charme qui me captivait.
La journée s'écoula sans qu’il ne prononce une seule parole. Néanmoins, il était l’attraction du jour. Les villageois se bousculaient devant la porte pour apercevoir le Vagabond. Quoiqu’aucun n’osât s’en approcher. Les plus anciens s'installaient au bar pour me conter des histoires fabuleuses à son sujet : comment il avait, à lui seul, terrassé le gigantesque dragon qui terrifiait le nord du pays ; son combat épique contre Sir Tyrius, monstre sanguinaire responsable de tant de guerres et de massacres ; et bien d’autres légendes. Les femmes, quant à elles, venaient toutes se pavaner devant lui dans l’espoir vain d’attirer son attention. En retrait, je guettais ses réactions, craignant qu’il ne soit offensé par l’attitude de tous ces idiots. Mais leur comédie semblait l’amuser.
Quand l'heure de fermer arriva, il fut le dernier à quitter les lieux. Se levant, il laissa quelques pièces sur la table et partit. Sans un mot ni un regard. Rien. Une immense tristesse me submergea. Je ne valais peut-être pas mieux que les autres, après tout. Je fis le tour de la salle machinalement pour nettoyer les tables et souffler les lanternes. Tout à coup, la porte grinça. J’avais encore oublié de la verrouiller. Sans doute un ivrogne attiré par la lumière. « On est fermé ! » lançai-je sans même me retourner.
Absorbée par ma tâche, j'entendis la porte claquer sans toutefois percevoir les pas feutrés qui s'approchaient. Je sentis alors un souffle chaud dans ma nuque qui me fit frissonner de plaisir. Il était revenu. Pour moi. Mon cœur battait la chamade. Mes joues devinrent rouges et brûlantes de fièvre. Je n’osai bouger. « Tu es mienne. » me chuchota-t-il langoureusement à l’oreille. Et dans une brise légère, il disparut.
Depuis, il hante chacune de mes nuits. Son regard envoûtant. Son sourire charmeur et ses bras puissants... Mais à l’aube, lorsque j’ouvre les yeux, je suis seule dans ce grand lit froid. Les draps humides et froissés d’avoir trop rêvé de lui.
Texte de L.S. Martins (30 minutes chrono, sans relecture).
D'après Image par ImaArtist de Pixabay : Vagabond Mythique Ancien - Photo gratuite sur Pixabay