L'amour de l'actrice Sumako (1947) Kenji Mizoguchi
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L'amour de l'actrice Sumako (1947) Kenji Mizoguchi
Une passion qui brise les conventions
La période de l’immédiate après-guerre, où sort L'amour de l'actrice Sumako, est une période de transition dans la cinématographie de Kenji Mizoguchi. C’est comme si le réalisateur affûtait ses talents avant d’engager la période la plus faste de son œuvre (celle des années 1950 à la Daiei avec Les contes de la lune vague après la pluie ou L’intendant Sansho). Cette période n’en demeure pas moins prolifique et intéressante, regorgeant des petites perles parfois mésestimées comme celle-ci.
On peut voir L'amour de l'actrice Sumako comme la biographie romancée de l’actrice du début du vingtième siècle Matsui Sumako, mais le film s’éloigne peu à peu de son sujet initial pour dresser le portrait d’une femme qui lutte contre les conventions de la société afin de vivre de son amour et de son art. Kenji Mizoguchi, en fin analyste de la nature féminine, transcende ici la réalité stricto sensu pour évoquer la naissance du théâtre moderne dans le Japon du début du siècle.
Tout d’abord L'amour de l'actrice Sumako se concentre sur la personnalité d’Hôgetsu Shimamura, metteur en scène de théâtre qui veut bousculer les codes du théâtre traditionnel en adaptant notamment au Japon La maison de poupées du dramaturge norvégien Henrik Ibsen. Il rencontre par hasard une jeune actrice malheureuse en ménage, Matsui Sumako, qu’il engage immédiatement pour jouer le rôle titre de la pièce, Nora. Commence alors une relation tumultueuse entre ces deux passionnés d’art qui les conduira peu à peu à rejeter le monde extérieur pour s’investir dans leur passion et leur amour du théâtre.
On a reproché à L’amour de l’actrice Sumako de n’être que peu fidèle à la réalité et d’affadir le personnage de la réelle Sumako. Sans doute si Kenji Mizoguchi n’avait pas pris les noms réels des protagonistes pour son film certaines critiques auraient été moins virulentes. Car les qualités du film ne manquent pas. La rigueur du maître japonais se ressent tout d’abord par la mise en scène épurée et la construction du scénario qui ne laisse place à aucune fioriture. Comme à son habitude, Mizoguchi ne nous raconte que l’essentiel, affinant petit à petit son récit jusqu’au catharsis final.
La délicate photographie de L'amour de l'actrice Sumako met en valeur une direction d’acteurs impeccable. Il faut dire que le réalisateur s’est peut-être identifié à cette histoire, eût égard à sa relation personnelle (très intime quoique chaste) avec son actrice fétiche Kinuyo Tanaka. Celle-ci effectue un travail remarquable tout en nuances. Si L’amour de l’actrice Sumako est un film mineur dans la carrière de Kenji Mizoguchi, il n’en reste pas moins un très beau film que bien des réalisateurs pourraient envier.