Désigné coupable (2021) Kevin Macdonald
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Désigné coupable (2021) Kevin Macdonald
Enfermé dedans
Si certains connaissent Kevin Macdonald, c’est principalement pour Le Dernier Roi d'Écosse, qu’il a réalisé en 2003. Cette adaptation d’un roman autour d’Idi Amin Dada avait valu à Forest Whitaker de nombreuses distinctions, dont l’Oscar du meilleur acteur. Le réalisateur écossais s’est d’ailleurs souvent coltiné avec la représentation cinématographique de personnages réels. Que ce soit au travers du documentaire ou de la fiction, ses films ont évoqué les vies aussi diverses que celle de son grand-père, Emeric Pressburger, celle de Whitney Houston ou bien de Klaus Barbie. Pour Désigné coupable, il a mis en images le scénario adapté du récit autobiographique de Mohamedou Ould Slahi, Les carnets de Guantánamo. Sa sortie, maintes fois reportée, interviendra à temps pour valoir au film plusieurs nominations aux Golden globes, octroyant à Jodie Foster le prix de la meilleure actrice dans un second rôle tandis que Tahar Rahim savourait sa nomination en tant que meilleur acteur dans un film dramatique.
En novembre 2001, Mohamedou Ould Slahi est de retour dans son pays, la Mauritanie, alors qu’il habite depuis plusieurs années en Allemagne pour y faire ses études. Une fête est donnée avec plusieurs de ses amis quand des militaires demandent à lui parler. Bien qu'à la suite de leurs questions il affirme ne pas savoir où est son cousin, on l'oblige à les suivre. Il a le temps de se changer et d'effacer l'ensemble des contacts dans son téléphone avant qu'on ne l'emmène. Trois ans plus tard, Nancy Hollander se voit confier son dossier par un ami, qui lui conseille de plaider sa cause : il a été transféré à la prison de Guantanamo. Accompagnée d'une de ses collègues, Teri Duncan, elle part à Cuba où elle découvre une prison ultra sécurisée, où on lui fait bien comprendre que les échanges qu’elles auront avec leur client seront filmés, mais que le son ne sera pas enregistré. Méfiant, Mohamedou se montre assez peu coopératif et fait signifier à ses avocates qu’il ne veut pas trop en dire par peur d’être sur écoute.
Premier conseil, si vous êtes diabétique, évitez de visionner Désigné coupable. Le film de Kevin Macdonald n’y va pas avec le dos de la cuiller dans le sentimentalisme à outrance et enchaîne des situations où une dose élevée de pathos s’avère problématique. On l’a compris dès les premières scènes, voire même dès la traduction française de The mauritanian, nous allons suivre un homme emprisonné à tort. Mais ça ne s’arrête pas là, et de nombreuses séquences vont faire monter inutilement un suspense qui n’a pas lieu d’être. La construction du long-métrage est basé sur de ridicules questionnements : l’avocate va-t-elle accepter le dossier, son assistante va-t-elle flancher, l’avocat de l’armée va-t-il douter, etc. La musique n’arrange rien, accompagnant avec la délicatesse d’un éléphant la moindre tension émotionnelle qui pointe du doigt. Et l’on n’évoquera pas les derniers moments du film, embarrassants et beaucoup trop longs.
Deuxième conseil, si vous êtes claustrophobe, n'allez pas voir Désigné coupable. L’intérêt du long-métrage réside dans ce qu’il arrive à retranscrire l’atmosphère carcérale dans laquelle se passe une partie des scènes. Le spectateur se sent souvent pris à parti par les images souvent violentes qui surviennent. La cruauté des sévices infligés à Mohamedou Ould Slahi ainsi que les conditions de détention inhumaines des prisonniers de Guantanamo ne souffrent aucun doute. La mise en scène sèche de Kevin Macdonald renforce ce sentiment d’étouffement, nous amenant dans un tel état que le moindre petit espace d’humour fonctionne assez bien. Ainsi les quelques moments où Tahar Rahim, à l’aise dans son personnage, adopte des comportements décalés par rapport à l’attendu des situations déclenchent un relâchement de la pression tout à fait bienvenu. De même, l’esquisse, pas assez aboutit de la relation de confiance qui s’instaure entre l’avocate et son associée est relativement appréciable.
Troisième conseil, si vous n'aimez pas la télévision des années 1980, Désigné coupable risque de ne pas vous plaire. C’est là un des reproches du film, qu’il se rapproche beaucoup trop d’une intrigue à la « Dossiers de l’écran ». Le débat n’est plus à faire : les États-Unis ont agi de façon atroce dans les mois et les années qui ont succédé aux attentats du 11 septembre 2001. Le traitement des prisonniers dans la base de Guantanamo était inacceptable, et plusieurs gouvernements successifs sont à blâmer. Une fois qu’on a dit ça, on a à peu près tout dit, mais la façon qu’a le long-métrage d’enfoncer le clou est assez insupportable. Se baser sur une histoire réelle c’est une chose, et l’on nous l’assène d’ailleurs dès le début, histoire de justifier la suite. Seulement la façon dont sont amenées les situations et les personnages, caricaturaux à l’extrême, dessert son propos. Un tel sujet mériterait de la finesse et de l’élégance, attributs qui hélas manquent cruellement au film.