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Au nom du père (1993) Jim Sheridan

Au nom du père (1993) Jim Sheridan

Published Apr 3, 2022 Updated Apr 3, 2022 Culture
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Au nom du père (1993) Jim Sheridan

How long must we sing this song ?

Dans la famille « engagé », voici Jim Sheridan, réalisateur irlandais qui aime son pays et ça se voit. En tant réalisateur ou producteur, il a signé des films qui évoquent le conflit opposant depuis trop longtemps l’Irlande du Nord et l’Angleterre, comme The boxer ou Bloody sunday. Mais il n’oublie pas le caractère humain nécessaire à toute bonne démonstration : ainsi avec Au nom du père il nous livre les portraits d’un homme et de son père, accusés à tort d’être des activistes de l’IRA et emprisonnés 14 ans dans des geôles britanniques. Une histoire vraie qui défraya la chronique dans les années 1980, adaptée du roman autobiographique de Gerry Conlon. Récompensé par l'Ours d'or au Festival de Berlin, le film repartira bredouille de la cérémonie des Oscars, où il avait pourtant sept nominations mais où triompha La liste de Shindler.

Le début

C’est l’histoire d’innocents sacrifiés au nom de la raison d’état et qui ne seront réhabilités qu’au bout d’un travail acharné pour laver leur honneur. Enfin des innocents entendons nous bien : Gerry n’est pas un enfant de cœur et il l’assume sans ambages dès le début du long métrage. Petit voleur à la tire, il fait le désespoir de ses parents au début des années 1970 ; ceux-ci décident alors de l’envoyer à Londres où de fil en aiguille il se retrouve bien malgré lui accusé d’un acte de terrorisme qu’il n’a pas commis. Son seul tort fut en l'occurrence d'avoir été au mauvais endroit au mauvais moment, et d'avoir provoqué, bien malgré lui, les mauvaises personnes. Après un interrogatoire digne de la grande époque stalinienne il va être contraint à signer des aveux qui le condamneront ainsi que son père à une peine d’emprisonnement.

Analyse

Seuls dans leur cellule, ce sera l’occasion pour les deux protagonistes d'Au nom du père de régler pas mal de comptes mais aussi de retrouver une complicité tant recherchée. Daniel Day-Lewis est comme à l’accoutumée très bon, autant dans le registre émotif que dans un rôle de fils rebelle qui ne demande finalement qu’une seule chose : la reconnaissance paternelle. Mais c’est surtout Pete Postlethwaite qui se révèle tout à fait impressionnant, donnant à ce personnage bourru mais qui suit son fils sans sourciller une profondeur indéniable. Un an avant d’incarner Kobayashi dans The Usual Suspects, il prouve qu’il peut vraiment tout jouer avec aisance. Citons aussi la prestation de Tom Wilkinson, qui, trois an avant The full monty, endosse le rôle d'un procureur plus vrai que nature.

Pamphlet virulent dénonçant une bourde monumentale de la police britannique, Au nom du père dépeint de façon très réaliste le climat des années 1970 et l’ambiance conflictuelle existant entre anglais et irlandais. Cet événement qui aurait pu passer pour un fait divers, et qui serait peut-être resté secret sans l’intervention pugnace de l’avocate britannique interprétée par Emma Thompson, pas assez présente malheureusement, a été rendu célèbre par son caractère exemplaire. Si plus de dix ans après les choses se sont enfin calmées, il aura fallu du temps et de l'énergie dépensée pour qu'enfin les nom des « quatre de Guilford » ne soient innocentés. On peut donc considérer qu'en 1993, une petite piqûre de rappel à la réalisation brillante n’était sans doute pas superflue, bien au contraire.

Car la mise en scène d'Au nom du père est impeccable. Refusant à la fois le sensationnalisme et le film à procès, Jim Sheridan parvient à susciter notre engouement et nous embarque dès les premières minutes du film dans son récit. Il est aidé en cela par le scénariste irlandais Terry George, qui s'acquitte assez justement de lourde tâche d'adapter le roman autobiographique de Gerry Conlon. Notons aussi le beau travail opéré par le compositeur Trevor Jones, dans une bande originale qui ne compte pas moins que Bono, Jimi Hendrix, The Kinks, Bob Marley ou Sinead O'Connor. Un bel écrin, somme toute, pour un long-métrage qui développe de façon judicieuse les rapports difficiles entre un père et un fils, et qui évoque frontalement un conflit qui, on ne le dira jamais assez, entraîna beaucoup trop de victimes.

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