Les chansons d’amour (2007) Christophe Honoré
On Panodyssey, you can read up to 30 publications per month without being logged in. Enjoy29 articles to discover this month.
To gain unlimited access, log in or create an account by clicking below. It's free!
Log in
Les chansons d’amour (2007) Christophe Honoré
C’est moi qui t’ai suicidé mon amour, moi qui t’ai ouvert les veines, je sais
Le moins que l’on puisse dire de Christophe Honoré c’est qu’il ne laisse personne de glace, même avec Les chansons d‘amour. Présenté en Compétition officielle au Festival de Cannes, le film reçoit autant d’éloges que de quolibets. Reparti bredouille de la quinzaine, il se consolera par un bouche à oreille favorable, en particulier chez les jeunes… et les homos (les deux pouvant se cumuler). C’est que le film parle d’une certaine jeunesse, insouciante et amoureuse, qui n’aspire qu’à être heureux et libre. Libre d’aimer, insouciants et légers : c’est bien le paradoxe du film, qui arrive à tirer d’un propos si lourd une légèreté si naturelle.
Dans un appartement parisien, Julie aime Ismaël. Mais Ismaël aime aussi Alice, qui aime également Julie. Tous trois partagent le même lit, et tentent de mener à bien ce ménage à trois. Mais cela ne va pas sans difficultés : la mère de Julie, qui considère Ismaël comme son fils, ne comprend pas forcément ce qui se trame entre eux. Quant à sa sœur ainée, elle sent bien toute la dangerosité de cette relation. Et ce qui devait arriver se produit : la jalousie pointe son nez incidemment, et Julie ne se sent plus vraiment aimé par ce bel indifférent qui joue malgré lui à un jeu bien dangereux.
Au début des Chansons d‘amour, Christophe Honoré adopte ce ton de poseur qui a fait sa renommée, et qu'il va explorer à l'envi, en particulier avec Dans Paris. Les mêmes démons reviennent ici l’obséder : un parisianisme élitiste, des références trop lourdes à porter… Malgré tout un changement de rythme apparait au détour d’une chanson : les références sont toujours là, mais pas les mêmes (on est passé de François Truffaut à Jacques Demy). Ici cette artificialité qui pouvait nous agacer prend tout son sens ; la forme fait corps avec le fond, et la mise en scène se fluidifie. C’est là toute la magie de la comédie musicale, où les poses affectées des acteurs deviennent des vecteurs de leurs pensées et de leurs actes.
Et là où Les chansons d‘amour fait preuve d‘une audace merveilleuses, c‘est quand la comédie musicale devient tragique. Le spectateur est alors emporté dans un flot de sentiments mis en scène avec une fluidité admirable. La caméra se meut dans un Paris admirablement représenté (ceux qui ont habité le quartier confirmeront), renforçant notre adhésion envers des personnages qui semblent si proches de nous. C’est d’ailleurs facilité par une troupe d’acteurs aériens qui savent si bien naviguer entre la futilité du quotidien et le désespoir des amours contrariées. Plaidoyer malgré lui pour la tolérance et la liberté, le film se révèle tout aussi convaincant dans le bonheur et dans le malheur. La vie passe et les amours trépassent (ou pas).