Deep end (1970) Jerry Skolimowski
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Deep end (1970) Jerry Skolimowski
Éducation sentimentale dans le Swinging London
L‘Angleterre de la fin des années 1960 est le cadre où se déroule l‘intrigue de Deep end. D’ailleurs si tant est qu’on puisse établir un lien entre des films aussi différents que celui-ci, Répulsion ou bien Blow up c’est que ces trois films sont réalisés par des réalisateurs expatriés dans le bouillonnement culturelle londonien de l’époque. Jerry Skolimowski en est alors à son sixième film, qui n’aura pas le succès escompté et qui deviendra par la suite un de ces objets un peu mythiques que s’échangent les cinéphiles. Le relatif succès récent d’Essential Killing avait permis de revoir ce charmant petit film dans une version restaurée qui met en valeur ses couleurs d’origine.
Sortant tout juste du collège, Mike a 15 ans quand il est engagé dans un établissement de bains à Londres. Sans perdre de temps, sa collègue Susan lui montre les lieux et lui explique vite fait son métier. Mike est tellement stressé et maladroit qu’il tombe dans la piscine et finit la visite en peignoir. Il enchaîne alors avec sa première cliente, une dame d’un certain âge à qui il donne le nécessaire : serviette, savon et shampooing. La cliente en profite pour titiller le charmant jeune homme qui, timide et effrayé, s’enfuit en courant. Susan lui annonce alors qu’il vont être amenés à échanger leurs secteurs en fonction de l’emploi du temps de la jeune fille, apparemment bien réglé.
Portrait en creux de la libération sexuelle de la fin des années 1960, Deep end est avant tout un film d‘ambiance. Le sujet principal est l’initiation sensuelle, voire sexuelle, d’un jeune homme empoté mais joli garçon. C’est autour de lui, et de ses multiples escapades pour conquérir sa belle, que gravite l’attention de la caméra. Car Mike tombe tout de suite amoureux de la jolie Susan et il ne sait évidemment pas comment s’y prendre pour attirer son attention. Pire, il se rend bien compte que la jeune femme se donne facilement à des hommes, souvent contre de l’argent, et que lui n’a pas grand-chose à offrir en échange de son amour.
Et c’est en ça que le film est beau, finalement : son héros ne perd jamais son innocence et sa pureté, et même s’il ne s’y prend pas toujours de la bonne façon c’est sa sincérité qui touche Susan. Cependant, cette petite amourette qui sert d’intrigue à Deep end ne serait pas plus intéressante que ça si elle n‘était le prétexte de nous montrer une capitale en effervescence et ses quartiers pas forcément très chics. On va suivre les personnages dans des clubs pas très clairs et dans des intrigues un peu coquines, témoin d’une époque qui s’affranchissait des règles non seulement artistiques mais également sociales.
Baigné d’une belle lumière et surtout de couleurs criardes qui donnent un effet pop surprenant, le film nous emporte dans les affres de cet adolescent aux hormones bouillonnantes et au visage d’ange. Car John Moulder-Brown était sans doute l’acteur idéal pour le rôle : furieusement sexy, le blondinet dégage un air d’innocence qui n’est pas sans rappeler le Tadzio de Luchino Visconti (il jouera d’ailleurs l'année d'après le prince Otto dans Ludwig ou le Crépuscule des dieux, pour n'assurer que le strict minimum dans la suite de sa carrière). Assurément, Deep end est donc l’un des films phare d’une époque révolue et absolument passionnante.