La chatte sur un toit brûlant (1958) Richard Brooks
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La chatte sur un toit brûlant (1958) Richard Brooks
You can’t hide from the truth because the truth is all there is
Peu de dramaturges ont été aussi bien adaptés que ne le fut Tennessee Williams, et La chatte sur un toit brûlant n’est pas une exception à la règle, malgré ce que certains peuvent penser. Et ce qui est fascinant c’est que toutes ces grandioses adaptations le furent durant son vivant. Il est ainsi étonnant de constater combien avec lui l’art théâtral et l’art cinématographique sont complémentaire. Les films adaptés de ses pièces n’ont ni l’éloquence guindée des pièces de théâtre classique, ni la trompeuse artificialité des pièces modernes. Ses histoires vivent, décrivent des être humains en souffrance et sont vibrantes d’émotion et de sensualité.
Dans leur chambre, Maggie et Brick font lit à part : lui préfère dormir sur le canapé tandis que sa plantureuse épouse dort dans le lit conjugal. Il faut dire que depuis quelques temps Brick boit, un peu trop au goût de Maggie qui l’a vu rentrer la nuit dernière une jambe dans le plâtre car il avait tenté de sauter des haies, soûl. Malgré tout Maggie tente de sauver son mariage, et elle veut à tout prix convaincre son mari d’accueillir à bras ouvert le père de celui-ci qui fêtera bientôt son anniversaire. Car Big Daddy est un homme influent, propriétaire terrien malade qui règne en despote sur sa petite famille.
Le personnage principal de La chatte sur un toit brûlant est une femme. Et quelle femme : cette Maggie a un caractère certain, pour ne pas dire un sacré caractère. Elle sait ce qu’elle veut, que ce soit récupérer son mari ou obtenir sa part d’héritage, et elle entend bien le dire haut et fort. Une femme de la trempe d’une Scarlett O’Hara, qu’on aime détester, autant pour son côté chipie que pour sa grandeur d’âme. Car à côté de la mesquine petite belle-famille qu’elle est obligée de se coltiner, voilà un personnage haut en couleur et en honnêteté.
C’est bien de ça dont on parle dans le film, la sincérité et le courage de dire la vérité. Toutes les familles ont des cadavres dans le placard et une fois que la vérité commence à sortir on ne peut plus l’arrêter. Et pourtant La chatte sur un toit brûlant élude le sujet principal de la pièce, et c‘est-ce que beaucoup lui reprochent. Si Brick se sent si mal depuis la mort de son meilleur ami, c’est qu’il était plus que ça pour lui. Le film ménage le suspens très longtemps pour ne jamais évoquer la question de l'homosexualité, sauf de façon éludée, car tous les signes sont là.
Ils passent par l’über-sexualité de Paul Newman, la façon dont il rejette sa femme (et pourtant la sensualité d’Elizabeth Taylor est ultra mise en avant ici), la relation quasi-mystique évoquée entre les deux hommes… On peut arguer que nous sommes en 1958 et que la société de l’époque est trop prude, or deux ans plus tard sortait Soudain l’été dernier. Seulement Richard Books n’a pas le talent de Joseph L. Mankiewicz, à qui les critiques de l’époque ont d’ailleurs reproché cette audace. Reste que la qualité de la mise en scène et de l’interprétation de La chatte sur un toit brûlant sont bien là, et le sujet reste fort malgré tout : ne boudons pas notre plaisir.