Qui est-elle ?
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Qui est-elle ?
Voilà tout ce que je connais d’elle : une silhouette dans un décor doré. Chaque soir, elle est là, silencieuse. Immobile. Qui est-elle ? Pourquoi reste-t-elle ainsi durant des heures ? Peut-être sait-elle que je l’observe, posté derrière cet arbre. Qu’elle m’obsède et m’intimide…
J’habite dans le quartier depuis mon enfance. Je n’ai jamais quitté cette ville, pas même pour les vacances. Mes parents n’en avaient pas les moyens et mes grands-parents vivaient au bout de la rue. Alors, il était naturel pour moi d’emménager à quelques mètres de la maison où j’ai grandi. Je ne voyais pas l’intérêt de partir. Ici, j’ai tous mes souvenirs, tous mes amis… Une bande de potes inséparables de l’école maternelle à l’université. Même si moi, je me suis arrêté en première année. Après le décès de mon père.
J’ai repris la supérette qu’il tenait pour soulager ma mère de ce fardeau. Elle ne pouvait plus rester enfermée entre ces quatre murs sans penser chaque seconde à l’homme qu’elle a tant aimé. Elle me disait l’entendre se plaindre des clients malpolis ou encore rire aux éclats alors qu’il venait de se faire tomber un sac lourd sur les pieds.
Ma vie était bien triste. Malgré les soirées entre amis. Malgré les dîners en famille. Je n’avais jamais rêvé finir derrière une caisse enregistreuse. Moi, je voulais vivre de mes dessins. J’avais un certain talent, à l’époque. Quand je couchais sur papier nos histoires de gamins. Une BD que tous dans le quartier s’arrachaient. Mais je n’ai plus touché un crayon depuis longtemps. Parfois, je m’assieds devant mes planches. Je les caresse du bout des doigts laissant vagabonder mon esprit. Et puis je reviens à la dure réalité et je file à mes ternes occupations.
Mais aujourd’hui, quelque chose a changé. Mon cœur bat la chamade chaque fois que je passe devant cette maison. Chaque soir, lorsque je quitte la supérette, j’ai l’espoir fou de l’apercevoir. Elle a emménagé il y a deux semaines dans cette maison sinistre. Une maison que personne n’osait approcher à cause des rumeurs. On la disait hantée par toutes les personnes mortes accidentellement à l’intérieur. La dernière en date, une petite fille qui s’y était aventurée pour récupérer son ballon. Les flics l’avaient retrouvé en bas des escaliers, le cou brisé. Une sombre histoire.
Et si elle ne savait pas. Si elle était en danger… Je devais la prévenir. Tout lui avouer sur cette étrange demeure. Aurais-je le courage de sonner si sa silhouette se dessine à la fenêtre ? Oserais-je lui avouer que je l’épie depuis des jours ? Mon doigt sur la sonnette, je ne peux plus faire demi-tour. Le carillon émet un bruit angoissant et des pas menaçants se dirigent vers moi. J’ai encore le temps de prendre mes jambes à mon cou. De m’enfuir. Pourtant, mon corps est comme paralysé.
La porte s’ouvre enfin et mon estomac se retourne. Devant moi, un homme au sourire pervers et la chemise couverte de sang. Il me fait signe d’entrer et, malgré toutes les alarmes qui hurlent dans ma tête, je le suis jusque dans le salon. Elle est là, elle aussi. Debout, à la fenêtre, elle semble m'attendre. Le regard vide, presque désolé. Une femme splendide aux courbes si parfaites. Mais elle n’est pas réelle. Elle ne l’est plus. Et je suis le prochain.
Texte de L. S. Martins (30 minutes chrono, sans relecture).
D'après Image par Stefan Keller de Pixabay : Femme La Fenêtre Léger - Image gratuite sur Pixabay
Margot Eden 2 years ago
Ben dis donc, tu aurais presque un début d'histoire ! Bravo !
L. S. Martins 2 years ago
Merci ;-)