La forêt des horreurs...
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La forêt des horreurs...
La première fois que j'ai aperçu ce regard, je rentrais chez moi après une soirée avec des amies. Il était tard, la nuit était sombre et un froid glacial brûlait la peau de mon visage.
Je longeais, comme tous les jours, la forêt des horreurs. Les habitants du coin l’avaient surnommée ainsi à cause des massacres qui y avaient eu lieu, il y a de cela quelques années. Un groupe de jeunes tués sauvagement autour de leur feu de camp. Certains racontaient que c’était l’œuvre d’un ours, d’autres que c’était un monstre assoiffé de sang et qu’il rôdait toujours dans les parages. À mon avis, il ne s’agissait que d’histoire pour terroriser les gamins et les décourager de s’y aventurer. Le sol y était très accidenté, la végétation extrêmement dense, il était si facile de s’y perdre ou de s’y blesser.
Qui pourrait croire qu’un fou furieux hanterait ce lieu à la recherche de sa proche victime ? Pas moi ! Mais étrangement, ce soir-là, une angoisse épouvantable me tenaillait les entrailles. Un pressentiment qui ne m’avait pas quitté depuis que j’avais franchi le seuil de chez moi ce matin. Comme s’il allait arriver quelque chose de terrible.
La journée s’était passée sans aucun accroc. Un emploi du temps chargé : cours, TD, pause déjeuner à la bibliothèque pour finir un devoir et séance de révisions avec mon groupe d’étude. J’étais épuisée, mais Clara avait réussi à me convaincre de sortir avec elle. Un petit verre entre copines… ça ne pouvait pas me faire de mal !
Le vent sifflait à mes oreilles, masquant les bruits sinistres qui résonnaient dans ces bois terrifiants. Au début, je trouvais cela rassurant. Mais plus je m’enfonçais dans la nuit plus j’avais l’impression que l’on m’observait. Que l’on me suivait. C’était parfaitement absurde, j’en avais bien conscience. Et pourtant… J’accélérai le pas. Les cailloux sur le bord de la route roulaient sous mes pieds. L’un d’eux finit sa course dans ma chaussure, mais je ne pouvais m’arrêter. Malgré la douleur, je conservais ce rythme endiablé.
Le cerveau en ébullition, je m’imaginais toutes les atrocités que l’on pouvait me faire subir. Étudiante en criminologie, j’en connaissais un paquet ! Je revoyais toutes ces images abominables qui peuplent mes livres. Toutes ces femmes massacrées par des malades. Était-ce ce qui m’attendait ?
J’aperçus enfin la lumière sur mon perron. J’avais encore oublié de l’éteindre, mais ce soir, j’en étais contente ! Encore quelques mètres et je serai au chaud chez moi. À l’abri. La seule maison à des kilomètres à la ronde. Le calme absolu. L’endroit idéal pour dépecer sa victime…
Je sortis mon trousseau de clés qui, bien évidemment, m’échappa des mains. Heureusement pour moi, il n’y avait que deux dessus, aucune chance de passer une heure devant ma porte, morte de trouille à tenter vainement de trouver la bonne. L'odeur accueillante de lavande qui flottait dans l’air m’apaisa aussitôt. J’étais enfin en sécurité.
Lorsque je m’apprêtais à fermer la porte, je les aperçus. De grands yeux lumineux, couleur ambre. Ils me fixaient. Menaçants. Je sentis peu à peu mon sang se glacer. Mon corps me faisait terriblement souffrir. Je devais rompre le contact avec ce regard, mais il m’était impossible de bouger. Pourquoi ?
Soudain, une sonnerie se mit à hurler. Mon téléphone ! Clara venait de me sauver la vie en me sortant de cet état de transe. Je claquai la porte, refermai tous les verrous avant de décrocher.
- Allô, Val ? Tu m’entends ?
Un bruit tonitruant résonnait derrière elle. Elle devait encore être dans ce bar.
- Clara. Clara, tu ne vas jamais imaginer ce que je viens de vivre…
- Val ? Flo… Flo est morte… Je viens d’avoir ses parents au téléphone. Ils ont retrouvé son corps à l’entrée de la forêt des horreurs…
- Flo ? Non…
Mon cœur se brisa au même instant où ce pressentiment étrange se dissipa. Je n’avais pas eu de ses nouvelles de la journée. Elle n’était pas venue en cours, mais ce n’était pas la première fois. Alors, bien sûr, personne ne s’était inquiété. Pas même moi… malgré cette impression épouvantable qui ne me quittait pas.
La forêt des horreurs… elle était bel et bien hantée. Habitée par une créature assoiffée de sang au regard aussi hypnotisant qu’un feu de camp. Ce soir-là, elle n'avait pas eu sa proie. Mais elle allait recommencer. Flo n'avait été que sa première victime. Qui sera la prochaine ? Moi ? Clara ?
Seul l’avenir nous le dira…
25 minutes chrono, sans relecture.
Texte de L.S.Martins.
Image par Jacques GAIMARD de Pixabay : Yeux De Chat Couleur Orage - Photo gratuite sur Pixabay