Mamie
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Mamie
Tant d'odeurs se mélangeaient dans l'air. Le miel, si doux et sucré. Les épices, fortes et poivrées. L'embrun marin, effervescent et salé. Chaque dimanche matin, alors que je me promenais avec Mamie le long des étales du vieux Nice. Les couleurs, les senteurs et les sons... tout était d'une telle richesse. D'une telle ivresse.
Ai-je idéalisé ces souvenirs ? Réduisant ainsi tout autre paysage à une pâle copie de ce paradis ? Peut-être. C'est même une certitude.
Plus rien ne saura me plaire. Me satisfaire autant que cette vision : moi, gamine, courant à travers ces rues étroites, voguant de trésor en trésor, accompagnée par l'accent chatant de ma grand-mère.
Aujourd'hui, rien n'est plus pareil. Tout semble avoir perdu de son éclat depuis que la chaleur de cette voix s'est éteinte. Depuis que la douceur de ce regard a disparu.
Mamie. Cette femme forte et pleine de vie, aimante et envahissante. Que c'est étrange de la voir allongée là. Immobile et silencieuse. Frêle et paisible. Les yeux embués, la gorge serrée, je reste là sans bouger. Par peur de troubler son sommeil. Son repos éternel. Je crois que c'est la première fois que je la vois si calme. Et cela m'effraie. Me terrorise. Comment ? Pourquoi ?
Des sanglots brisent le silence. Mes sanglots. Je tombe. Je crie. Parce que je réalise. Je réalise que plus jamais elle ne me prendra dans ses bras. Plus jamais elle ne me parlera de ses copines un peu folles. Plus jamais je n'entendrai son rire cristallin.
Je suis partie depuis tant d'années. De déménagement en déménagement, nous nous sommes éloignées. Je l'ai presque oubliée. Pourtant, je n'ai jamais cessé de l'aimer. Le savait-elle ? Se souvenait-elle de moi lors de ces derniers instants alors que la maladie rongeait son esprit ?
Aujourd'hui, rien n'est plus pareil. Tout me semble fade. Tout me semble triste. Même le ciel pleure au moment de lui dire un dernier adieu. Grace n'a plus d'odeur. Plus de parfum. Juste une incroyable mélancolie teintée de remords et de non-dits.
Hommage à ma grand-mère.
Texte de L. S. Martins (20 minutes chrono, sans relecture).
Image par Peter H de Pixabay