Finis...
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Finis...
Tout semble si paisible dans ce décor de brume. Comment aurions-nous pu nous douter de ce que nous risquions en nous aventurant sur ces eaux calmes ? Comment aurions-nous pu nous douter que ce lac était la demeure d’une immense et féroce créature ? Nous sommes finis et nous mourrons sans avoir revu nos familles.
Tout a commencé, il y a cinquante lunes, si mes calculs sont exacts. Nous vivions en paix – autant que cela soit réalisable, bien sûr – dans un petit village proche des côtes du sud. Aucun de nous n’était guerrier. Nous étions tous d’humbles paysans partageant connaissances et savoir-faire pour le bien de la communauté. Nous avions nos propres règles, notre propre mode de vie, et nous dérangions. Les seigneurs des alentours ont tenté maintes fois de nous asservir, nous réclamant des taxes sur nos récoltes. Et chaque fois, nous avons refusé. Les dieux, eux-mêmes, nous ont permis de vivre ici, de cultiver ces terres. Personne ne peut se les approprier. Personne ne peut monnayer notre planète…
Nous vivions donc en paix, jusqu’à leur assaut. Ils…, des êtres immondes, mi-homme mi-je-ne-sais-quoi. Ils nous ont attaqués, profitant de l’obscurité de la nuit. Ce ne sont ni nos terres, ni notre style de vie qui les intéressaient. Ils étaient là pour nous. Pour notre chaire et nos connaissances… Voilà pourquoi, Pierre et moi, avons été kidnappés. Leurs enfants gravement malades mourraient les uns après les autres. Ils avaient besoin de nos talents de guérisseurs pour comprendre. Pour aider leurs petits à guérir et grandir. Mais nous ne savions rien du mal qui les rongeait. Nous étions tous deux ignorants face cette étrange épidémie.
Et ce matin, pour la première fois depuis des mois, la porte de notre prison était restée ouverte. Un accident ? Une erreur de notre geôlier ? J’en doute, à présent. Il s’agit, de toute évidence, d’un nouveau jeu. D’une toute nouvelle torture pour nous faire plier. Pour nous obliger à les secourir. Quelle ironie !
Malgré la fatigue et la douleur, nous avions tous deux décidé de saisir notre chance. Nous nous sommes hissés hors de notre cachot, aveuglés par cette lumière trop vive. Nous avons longé le couloir menant aux escaliers et couru à l’extérieur sans jamais nous retourner. Dehors, nous avons volé la barque d’un pêcheur certainement venu vendre sa prise du jour aux cuisines et avons ramé des heures durant. Qu’importe la direction, tant que nous nous éloignions d’eux. Enfin…
Comment aurions-nous pu nous douter de ce que nous risquions en nous aventurant sur ces eaux calmes ? Nous étions loin de nous imaginer que sous cette vieille coque de bois se cachaient d’immenses mâchoires prêtes à nous dévorer. Et que nos tortionnaires se tenaient non loin d’ici, guettant chacun de nos faits et gestes. Prétextant nous sauver en échange d'une aide que nous ne pouvons leur offrir.
Texte de L.S. Martins (30 minutes chrono, sans relecture).
D'après Image par Xandra Iryna Rodríguez de Pixabay : Requin Blanc Les Requins Pêche - Photo gratuite sur Pixabay.