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Le Château des singes (Jean-François Laguionie, 1999)

Le Château des singes (Jean-François Laguionie, 1999)

Publié le 1 mars 2021 Mis à jour le 1 mars 2021 Culture
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Le Château des singes (Jean-François Laguionie, 1999)

"Le château des singes" est le deuxième long-métrage de Jean-François LAGUIONIE réalisé dans le cadre de sa société de production cévenole La Fabrique fondée en 1979 (surnommée ainsi en raison du fait qu'il s'agissait à l'origine d'un atelier de bobinage de fils de soie). La filiation artisanale est assurée par le fait que le film a été réalisé entièrement à la main (le DVD ne lui rend d'ailleurs pas justice avec sa jaquette cheap). Il est le fruit d'un compromis réussi entre l'œuvre d'auteur et la recherche d'une adhésion populaire (de l'aveu même de Jean-François LAGUIONIE, c'est la première fois qu'il a réalisé un film en pensant aux enfants). Si bien que tout en étant un récit initiatique classique peuplé de figures archétypales issues des contes (le roi, la princesse, le méchant, le héros sans parler des chansons qui peuvent évoquer les classiques Disney), "Le château des singes" est une fable philosophique qui porte la marque de son réalisateur. Il préfigure "Le Tableau" (2011) en ce qu'il met en scène les préjugés que des peuples pourtant issus de la même origine entretiennent les uns vis à vis des autres. Ici pas de "Toupins" et de "Pasfinis" mais deux tribus de singes séparées autrefois par un cataclysme, l'une, les Woonkos vivant dans la canopée et l'autre, les Laankos vivant sur le plancher des vaches. La première vit quasiment à l'état sauvage alors que la seconde évoque plutôt la civilisation de la Renaissance, sa sophistication étant contrebalancée par de sombres complots politiques qui se situent entre Hamlet et le tsar Ivan, Shakespeare et Sergei M. EISENSTEIN étant explicitement cités, le second non seulement pour "Ivan le Terrible" (1943) mais aussi pour "Alexandre Nevski" (1938) avec la séquence sur le lac gelé. Jean-François LAGUIONIE met en scène Kom, un jeune Woonko curieux et impertinent qui à l'inverse de ses congénères remet en cause l'enseignement binaire qu'il reçoit du prétendu sage de la tribu pour qui "tout ce qui vient d'en haut est bon et tout ce qui vient d'en bas est mauvais". Jean-François LAGUIONIE égratigne ainsi le bourrage de crâne, les idées toutes faites et le manichéisme. Kom débarque donc logiquement chez les Laankos dont l'enseignement fait l'objet d'une critique tout aussi pertinente. Maître Flavius (doublé par Michael LONSDALE) est présenté comme un vieux "singe savant" incapable de naturel et d'esprit critique. Lorsqu'il explique la géographie verticale de la hiérarchie sociale (calquée sur "Metropolis" (1926) et sur "Le Roi et l'Oiseau (1979) du maître de Jean-François LAGUIONIE, Paul GRIMAULT) à Kom en lui disant que les singes supérieurs vivent en haut de la tour, Kom lui répond que les Woonkos sont logiquement supérieurs à eux puisqu'ils vivent dans la canopée, très au-dessus d'eux ce qui a pour effet de donner d'autant plus de relief ironique à la chanson "Assimiler pour être civilisé" où Kom s'interroge sur son identité hybride. L'intrigue m'a fait penser par ailleurs à un récit d'héroïc-fantasy écrit par Georges-Olivier Châteaureynaud et publié en 1991 dans le magazine "Je Bouquine". Intitulé "Le combat d'Odiri", il décrit deux peuples humains, l'un évolué, vivant dans les airs mais se faisant la guerre et l'autre, primitif, vivant dans la forêt et aux prises avec de dangereuses créatures et raconte l'histoire d'un transfuge primitif dans le monde évolué.

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