L'Homme qui tua Don Quichotte (The Man Who Killed Don Quixote, Terry Gilliam, 2018)
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L'Homme qui tua Don Quichotte (The Man Who Killed Don Quixote, Terry Gilliam, 2018)
"L'Homme qui tua Don Quichotte" c'est l'oeuvre d'une vie en tout cas d'un quart de siècle de vie. On ne peut mettre en effet de côté ce contexte, de toutes façons celui-ci est rappelé au début et à la fin avec l'hommage au premier Don Quichotte choisi par Terry GILLIAM, Jean ROCHEFORT ainsi qu'à un autre acteur ayant participé au projet et décédé entre temps, John HURT. C'est le film maudit d'un cinéaste qui lors de sa première tentative de le réaliser au début des années 2000 subit toutes les catastrophes possibles et imaginables jusqu'à l'abandon pur et simple du film dont ne subsista que le passionnant documentaire "Lost in la Mancha" (Doc.) (2003). Quinze ans plus tard, Terry GILLIAM parvint à ses fins avec un nouveau casting bien que là encore, des embrouilles juridiques avec le producteur Paulo BRANCO ne mette son tournage et sa sortie en péril.
Malgré ses mises en abyme permanentes et sa mise en scène baroque caractéristique, j'ai trouvé le film de Terry GILLIAM bien moins confus que beaucoup d'autres réalisés ces vingt dernières années. Terry GILLIAM est un cinéaste visionnaire, à l'imaginaire puissant et dont l'esthétique foisonnante se nourrit de multiples références picturales et architecturales notamment mais qui a besoin d'une aide extérieure pour canaliser ce débordement d'images délirantes. C'est pourquoi ses meilleurs films sont des adaptations très personnelles d'oeuvres préexistantes dans lesquelles il se retrouve: "1984" de George Orwell, "Les aventures du baron de Munchausen" de Rudolph Erich Raspe, le scénario de Richard LaGRAVENESE à l'origine de "Fisher King" (1991), "La Jetée" (1963) de Chris MARKER ou encore le livre de Hunter S. Thompson. Dans les deux premiers exemples cités ("Brazil" (1985) et "Fisher King") (1991), l'ombre de Don Quichotte planait déjà. Jonathan PRYCE reprend d'ailleurs le rôle du nobody qui s'échappe dans un monde fantasmatique où il devient un chevalier sans peur et sans reproches qu'il jouait déjà en 1985. Simplement dans "Brazil" (1985) le combat de Terry GILLIAM contre l'industrie cinématographique était maquillé en lutte contre le totalitarisme. Dans "Fisher King" (1991) on en avait une belle variante avec l'amitié entre le clochard-chevalier Parry (Robin WILLIAMS) et le producteur de radio cynique en quête de rédemption Jack Lucas (Jeff BRIDGES). Le personnage de Toby joué par Adam DRIVER est une sorte de cousin de Jack Lucas, réalisateur de publicités cynique qui en découvrant les ravages qu'il a fait autour de lui en renonçant à ses rêves de jeunesse va tenter de se racheter (auprès de lui-même et de ceux à qui il a fait du mal). En ce sens, la trame du film est limpide et rend le film particulièrement émouvant.