Atlantique (Mati Diop, 2019)
Sur Panodyssey, tu peux lire 30 publications par mois sans être connecté. Profite encore de 29 articles à découvrir ce mois-ci.
Pour ne pas être limité, connecte-toi ou créé un compte en cliquant ci-dessous, c’est gratuit !
Se connecter
Atlantique (Mati Diop, 2019)
Je suis ravie d'avoir vu ce film dont j'avais entendu des avis contrastés lors de sa remise du grand prix à Cannes. Dès les premières scènes, j'ai accroché car j'aime le mélange des genres et je l'ai ressenti immédiatement. En effet celles-ci montrent la colère de jeunes travailleurs africains exploités tout en les nimbant dans une échelle plus grande qui vibre dans chaque plan du film, celle des forces de la nature: poussière, vent, vagues, soleil rouge sang, nuit profonde. La colère gronde et s'apprête à déferler sur une banlieue populaire de Dakar en proie aux injustices quotidiennes: corruption, inégalités de classe, mariages arrangés, trafics humains etc.
Très vite on quitte les rivages du réalisme pour glisser insensiblement vers ceux du fantastique quand les fantômes des jeunes ouvriers disparus en mer alors qu'ils traversaient l'océan pour rejoindre l'Espagne reviennent posséder les vivants sans qu'ils n'en aient conscience. De mystérieux phénomènes surgissent alors: un lit de noces qui brûle, des fièvres qui s'emparent des amies de la mariée, les étranges malaises du commissaire chargé de mener l'enquête etc. Le film adopte en effet le point de vue des filles restées au pays, tiraillées entre les pressions sociales pour faire de beaux mariages et les décisions de leurs amis qui partent sans les prévenir. Certaines s'accomodent de la situation, deviennent cyniques, matérialistes et décident de se jouer des hommes pour se forger une belle situation. D'autres comme Ada, l'héroïne ne parviennent pas à s'y faire et souffrent en silence. Mais l'espèce d'énergie cosmique (symbolisée par un bar de plage qui la nuit venue scintille sous les rais de lumières) qui revient du large fait souffler un vent de révolte sur ces filles qui deviennent vengeresses ou tout simplement recherchent sans répit à retrouver l'être aimé pour communier avec lui. Bref Mati DIOP mérite amplement son prix pour un premier long-métrage qui ressemble à un coup de maître et est une cinéaste à suivre.