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L'argent de la vieille (1972) Luigi Comencini

L'argent de la vieille (1972) Luigi Comencini

Pubblicato 9 mar 2023 Aggiornato 9 mar 2023 Cultura
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L'argent de la vieille (1972) Luigi Comencini

Rira bien qui rira le dernier

La comédie italienne prend sa source dans les années 1950. Contrepoids idéal à la vague néoréaliste qui se développe en parallèle, le genre mélange habilement moments de pure comédie, quelquefois burlesque, le trait étant souvent caricatural, et une analyse juste et mordante de la situation sociale de l’Italie. Ses auteurs les plus fameux sont Dino Risi, Ettore Scola ou Luigi Comencini. On y trouve du bon et du moins bon, citons quelques perles comme Divorce à l’italienne ou Affreux, sales et méchants. Comme dans ce dernier, les protagonistes de L’argent de la vieille habitent dans un bidonville. Et Comencini confronte cette misère sociale au monde luxueux et impitoyable d’une riche américaine.

Le début

Une vieille milliardaire américaine, qui voyage à travers la planète selon les envies, prend un malin plaisir à rencontrer, dans chacun des lieux qu'elle sillonne, les pauvres qui résident dans les bidonvilles et les quartiers pauvres. Elle se sent dans ces situations encore plus fortunée que ces gens, à qui elle aime à raconter qu'elle est plus astucieuse, et que donc sa richesse serait un juste retour des choses. Elle joue régulièrement à la scopa, pour leuquel la mémoire est essentielle et où la réflexion prime. Toutefois, l'argent dont elle dispose lui permet de renchérir de façon régulière les sommes qui sont en jeu, ce qui fait que les moins fortunés qu'elle, qui sont ses partenaires, ne parviennent pas à suivre, et qu'elle gagne donc systématiquement. 

Analyse

L’idée de L'argent de la vieille est venue au scénariste Rodolfo Sonego d’une anecdote qu’il avait entendue : une millionnaire sillonnant le monde retrouvait chaque année un couple d’italien miséreux pour faire des parties de carte. Grossissant le trait, il prête à Bette Davis le visage de cette vieille excentrique et à Silvana Mangano et Alberto Sordi celui d’Antonia et Peppino. Vivant chichement avec leur cinq enfants dans un logement de fortune, ils retrouvent chaque année « la vieille » dans sa luxueuse maison, caressant l’espoir de la plumer et de sortir de leur misère. Seulement voilà, depuis huit ans le même scénario se déroule et ils rentrent bredouille. Cette année ils sont fin prêts et motivés, encouragés par toute la bande de leurs voisins du bidonville.

L’humour de L’argent de la vieille est dévastateur, les dialogues sont aux petits oignons et tombent juste au bon moment, la galerie de personnages pittoresques est très bien vue. Luigi Comencini fait preuve d’un cynisme et d’une cruauté rarement égalés : comme dans Affreux, sales et méchants, on ne peut s’empêcher d’éprouver de la sympathie pour ces laisser-pour-compte malgré toutes les petites bassesses qu’ils peuvent s’envoyer. C’est un des grands atouts du film : bien qu’étant une féroce allégorie de la lutte des classes, aucun parti-pris n’est engagé. La cruauté de la vieille est clairement dépeinte (cf. la scène où elle montre les photos des pauvres qu’elle plume à travers le monde entier) mais le couple italien n’est pas mieux loti, avec sa soif inextinguible d’argent facile.

Et le casting de L'argent de la vieille est quasiment parfait. Bette Davis campe cette peau de vache avec un plaisir que l’on pressent et Alberto Sordi joue brillamment le benêt qui sait se montrer émouvant. Mais celle qui illumine le film c’est Silvana Mangano. Se transformant en un tournemain d’une Cendrillon en haillon en grande dame qui veut faire impression, elle se montre mesquine et séductrice pour en venir à ses fins. Cette actrice peut décidément tout jouer, de l’aristocrate à la prolétaire, tous les rôles lui vont comme un gant. Grâce à ses interprètes et à une critique mordante mais qui ne perd pas une seconde son but premier, à savoir faire rire, L’argent de la vieille est une des plus grandes réussites du cinéma transalpin des années 1970.

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