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Mogambo (1953) John Ford

Mogambo (1953) John Ford

Pubblicato 23 ago 2022 Aggiornato 23 ago 2022 Cultura
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Mogambo (1953) John Ford

Chasseur blanc, cœur partagé

En 1950 est réalisé une adaptation du roman de Henry Rider Haggard, Les Mines du roi Salomon, qui reçu deux Oscars. Les studios, sentant l’exploitation commerciale qu’ils pourraient en tirer, proposent à John Ford de tourner un long-métrage en Afrique. Le réalisateur, qui est alors une des personnalités les plus en vue d’Hollywood, accepte le projet bon an mal an, en engageant comme protagonistes non moins que Clark Gable, Ava Gardner et Grace Kelly. La trame du film est tirée d’une pièce de théâtre, qui avait déjà fait l’objet d’une version pour le cinéma, La Belle de Saïgon, toujours avec Clark Gable. Le contexte géographique est encore une fois une colonie, mais ici africaine, ce qui permet au réalisateur de tourner au Congo, au Kenya et en Tanzanie. Les deux actrices récolteront deux nominations aux Oscars, mais seront supplantées par Audrey Hepburn et Donna Reed.

Le début

L’aventurier Victor Marswell est un homme aguerri qui organise des safaris en Afrique et capture des animaux pour les revendre à des zoos. Quand arrive Eloïse Kelly, qui vient rejoindre un maharadja pourtant déjà reparti depuis une bonne semaine, son tempérament méfiant et sa misanthropie ne lui accordent pas un accueil très chaleureux. Mais ces deux-là ne vont pas tarder à tomber sous le charme l’un de l’autre et à débuter une liaison torride. Ils sont bientôt rejoints par Donald Nordley et son épouse Linda, que Victor accompagne dans une expédition dangereuse à la rencontre de gorilles. Bien entendu, Linda va se laisser séduire par Vicror, lui-même ne demeurant pas insensible à cette belle anglaise. Les ingrédients du triangle amoureux sont en place, chacune et chacun étant prêts à jouer leur rôle dans ce décor exotique qui exacerbe les passions.

Analyse

On peut voir Mogambo comme, avant tout, un cri d’amour que pousse John Ford au continent africain. Les paysages sont à couper le souffle, les animaux sauvages sont filmés dans toute la force de leur majesté, les tribus africaines sont présentées avec respect et sans condescendance aucune. Le travail sur la photographie des deux chefs opérateurs Robert Surtees et Freddie Young met très justement en valeur les décors naturels et l’exotisme des lieux. Forcément, avec le recul, on peut aussi avoir une lecture plus réservée concernant cette Afrique aux clichés multiples montrée par des occidentaux en occultant le fait qu'elle est au bord de l’indépendance. Certes, l’intention du réalisateur n’est pas maligne, et c’est peut-être sa vision qui sauve les arrières-pensées sans doute moins idéalistes des producteurs, à l’origine du projet. Ceci dit, cinématographiquement parlant, l’image est d’une qualité irréprochable.

Et puis Mogambo c’est aussi trois acteurs magnifiques. Clark Gable en fera craquer plus d’une, et pourquoi pas plus d'un, dans ce rôle certes très formaté mais qui lui convient à merveille, celui de l’aventurier bourru qui n’a besoin de personne mais qui tombera fatalement dans les filets des deux femmes fatales. Encore une fois, le personnage est plus que critiquable, surtout avec un œil moderne où les critique du mâle blanc dominant de plus de cinquante ans abondent à juste titre. De son côté, la sublime Ava Gardner incarne une fois encore une femme libre et indépendante au passé chargé, qui a décidé de croquer la vie à pleines dents, quelles qu’en soient les conséquentes. C’est du déjà-vu, on est d’accord, et cela fige l’actrice dans un registre éculé qu’elle maîtrise tout à fait mais qui l’enferme tout de même un petit peu.

Quant à Grace Kelly, qui sort tout juste du Train sifflera trois fois, elle joue à merveille le rôle d’une femme qui refoule ses sentiments naissants à l’égard d’un homme totalement différent d’un époux qu’elle n’aime finalement pas vraiment. On reste dans les poncifs jusqu’au cadre totalement inconnu dans lequel évolue l’intrigue de Mogambo, et qui force ainsi les protagonistes à se dévoiler à eux-mêmes, tandis que l’analyse psychologique, quoique légère, révèle tout de même assez bien les différents atermoiements de l’âme de chacune et de chacun. On obtient un film riche et élégant, avec de l’émotion, de la sensualité, des aventures, des beaux acteurs et des décors superbes. Que demande le peuple, peut-être un zeste de nuance et un petit peu moins de situations attendus, certes. Mais on peut aussi se laisser porter par l’ambiance et par les qualités artistiques du film.

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