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Happy Sweden (2009) Ruben Östlund

Happy Sweden (2009) Ruben Östlund

Pubblicato 26 mag 2020 Aggiornato 26 mag 2020 Cultura
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Happy Sweden (2009) Ruben Östlund

La froideur scandinave

Avant d'obtenir une Palme d'Or pour The square, le réalisateur suédois Ruben Östlund avait réalisé quatre long-métrages. C'est avec son deuxième, Happy Sweden, qu'il commença à attirer l'oeil des critiques internationaux. En 2008, le film avait été présenté à la section Un certain regard du Festival de Cannes. La sélection mettait en avant deux autres cinéastes en devenir : la réalisatrice américaine Kelly Reichardt et le britannique Steve McQueen, qui pour son premier film Hunger décrochait alors la Caméra d'Or. Le film de Ruben Östlund, quant à lui, fut par la suite sélectionné au Festival du film de Stockholm, où il reçu (étonnemment) le Prix du scénario. Puis la Suède le choisit pour représenter le pays à la cérémonie des Oscars, mais le film ne fut finalement pas retenu par l'Académie. Il permit toutefois au réalisateur d'acquérir une solide notoriété, et ses films suivant feront le tour des festivals à travers le Monde.

Pour une soirée d'anniversaire, la jeune Mia retrouve de nombreuses personnes qu'elle n'a pas vu depuis qu'elle était petite. La fête se déroule chez les parents d'une enfant qui était à l'époque la risée de toute l'école. La nouvelle compagne d'un invité, d'origine asiatique, est récemment arrivée en Suède, est également de la partie. Un feu d'artifice est lancé pour le plus grand plaisir des invités. Le dernier pétard n'a pas l'air de s'enclencher et l'hôte, Wimar, s'en approche au grand dam de son épouse, qui trouve qu'il a trop bu pour être assez clairvoyant. Une explosion a alors lieu tandis qu'il en est très proche, et chacun retourne dans le salon. Plus tard, dans un autobus, une femme s'adresse à une actrice, lui faisant de nombreux compliments sur la pièce qu'elle a joué quelques temps auparavant. Elle trouve remarquable qu'elle prenne le car comme tout le monde, au lieu de voyager en avion ou en taxi.

Le découpage de Happy Sweden est géométrique, le film étant constitué de plusieurs histoires parallèles qui n'ont rien en commun, si ce n'est qu'elles ne se déroulent pas comme prévu. Soient un incident qui se produit dans une fête bourgeoise d'anniversaire, une dégradation qui provoque le courroux d'un conducteur de car, une jeune fille qui se retrouve inconsciente après avoir trop bu, une institutrice qui se voit ostracisée alors qu'elle ne fait que pointer du doigt des comportements qu'elle estime inappropriés, et un homme qui se fait plus ou moins agresser par un de ses amis durant un week-end. Chacune de ces anecdotes se déroule pourtant a priori tout à fait normalement jusqu'à ce qu'une petite chose déraille, et mette en lumière  les dysfonctionnements souterrains. C'est en substance le propos de Ruben Östlund : le réalisateur souhaite manifestement, et de façon assez grossière, montrer comment les façades peuvent se fissurer.

Car c'est bien de cela que Happy Sweden veut parler, les contradictions du modèle scandinave. La Suède est réputée pour son sens du compromis et par la douceur apparente de ses rapports sociaux, et Ruben Östlund s'acharne, petit à petit, et film après film, à démonter ces a priori. Ainsi par exemple le rapport qu'entretiennent ses compatriotes à l'alcool semble beaucoup plus compliqué que l'apparence semble nous le montrer. Car ce que ne dit pas le film, c'est que la Suède est un pays où la législation concernant la vente de boissons alcoolisées est très contraignante, ce qui occasionne des dérapages, la consommation d'alcool se faisant bien souvent trop vite et en trop grande quantité. Cet infime détail, qui permet de mettre en perspective plusieurs des scènes du film, est un élément que les Suédois connaissent très bien et n'ont donc pas besoin de se le faire rappeler. Pour un spectateur étranger, une piqûre de rappel serait toutefois la bienvenue.

Il en est ainsi de nombreux comportement de Happy Sweden, qui font que le film est sûrement plus facilement appréciable pour les Suédois. Le film semble donc être destiné au marché national, Ruben Östlund semblant envoyer un message à ses concitoyens : vous n'êtes pas aussi irréprochable que vous semblez le croire. C'est d'ailleurs le sentiment que l'on ressent en regardant le film, celui que le réalisateur jette en permanence un regard critique sur ce qu'il filme. Son parti-pris de mise en scène ne fait qu'abonder dans ce sens. Chaque scène est constituée d'un plan fixe, quasiment toujours filmé de loin et souvent en hauteur. Le cinéaste se démarque ainsi de ses personnage et semble nous signifier qu'il est loin d'approuver leurs comportements. Cette froideur dans la mise en scène écarte toute forme d'empathie, et le spectateur se détache finalement de ce qui se passe devant l'écran, empêchant toute forme d'émotion d'apparaître, un peu comme dans les films de Michael Haneke.

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