Pink Floyd The Wall (1982) Alan Parker
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Pink Floyd The Wall (1982) Alan Parker
We don’t need no education
Habitués des albums concepts tels que Dark Side of the Moon, les Pink Floyd accouchent en 1979 de l’album The wall. Enfin on devrait plutôt dire Roger Waters tant son implication dans le projet est primordiale, faisant écho à la place de plus en plus importante que prend le bassiste dans un groupe qui à partir des années 1980 commence déjà à se disloquer à petit feu. Pour parachever son œuvre, Waters fait appel en 1982 à Alan Parker afin de mettre en images les chansons de l’album : ça donnera Pink Floyd The Wall (remercions au passage la traduction française sans qui on ne saurait pas qu’il s’agit bien d’eux), opéra rock halluciné et hallucinant, nous emportant dans un univers foisonnant où la musique du groupe tient une place prépondérante.
L’histoire de Pink n’a rien de bien marrant : après la mort de son père durant la Seconde guerre mondiale, le jeune garçon en quête d’affection se tourne tout naturellement vers sa mère. Commence alors une relation fusionnelle entre une femme étouffant son fils unique qui, lui, n’aura de cesse tout au long de sa vie de se référer à cette figure maternelle imposante. Puis vient le mariage de Pink, et une histoire d’amour tumultueuse commence alors, relation qu’il n’arrive manifestement pas à gérer ce qui conduit à un divorce tout aussi agité. Devenu rock-star, Pink va alors développer un rapport fusionnel avec son public, se prendre au jeu de la célébrité, ce qui nous amène à une chambre d’hôtel où le héros… n’en disons pas plus.
Du reste ceci n’est qu’une interprétation parmi tant d’autres de The wall : quasiment sans dialogue, celui-ci nous montre principalement des images illustrant la musique de l’album qui passe en fond sonore. Malgré tout, les paroles des chansons écrites par Roger Waters sont assez éloquentes pour nous faire une idée assez précise du sens que le bassiste entend leur donner. D’autant que ces paroles sont largement autobiographiques : un père mort pendant la Seconde guerre mondiale, une mère tyrannique, une éducation rigide, un divorce. Sans compter sur la présence fantomatique de Syd Barrett, membre fondateur des Pink Floyd, qui plane sur l’œuvre : abus de drogues en tous genre (en particulier de LSD), schizophrénie, paranoïa.
C’est en partie ce qui donne à The wall son authenticité, sa fraîcheur, son énergie. On sent bien derrière le film et les chansons la rage sourde qui anime Roger Waters. Une volonté de tout balancer, quitte à trop en faire, tenter le tout pour le tout, et le sortir une fois pour toutes. La dénonciation est forte bien sûr, que ce soit celle de l’éducation rigide des années 1960 (on voit clairement poindre les idées de mai 68), de la guerre qui a rarement été filmée aussi près des corps estropiés, mais aussi de la société de consommation et bien sûr cette comparaison qui fit scandale et pour autant sublime du star-system et du fascisme. On notera au passage la référence à 1984, de George Orwell, qui dans ses thématiques fait tout autant allusion à l'aliénation des foules.
Mais la grande réussite, ce qui fera de The wall un film culte pour certains, et pour de nombreux fans de Pink floyd en particulier, c’est l’alchimie parfaite qui existe entre le son et l’image. Alan Parker réussit ce tour de force rare de mettre en image un univers psychédélique riche tout en réussissant à captiver le spectateur. Ni la musique ni les images ne prennent le pas l’un sur l’autre, le tout se tient impeccablement et l’un se nourrit de l’autre. On pense au Yellow Submarine des Beatles, que le film, sorti en 1968, mettait tout aussi bien en scène. On plane sur la musique et les images, on garde en tête les masques de ces enfants qui défilent sur la musique d'Another brick in the wall. Si bien qu’on ne peut plus aujourd’hui écouter l'album sans penser au film, et inversement.