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Cunningham (2019) Alla Kovgan

Cunningham (2019) Alla Kovgan

Pubblicato 27 ago 2023 Aggiornato 27 ago 2023 Cultura
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Cunningham (2019) Alla Kovgan

De la difficulté à rendre compte d'un univers foisonnant

La réalisatrice de Cunningham est née à Moscou en 1973. Alla Kovgan est une artiste, qui depuis ses vingt ans voyage en Europe et aux États-Unis pour promouvoir la pluridisciplinarité artistique au travers du média cinématographique. Elle est en particulier membre de Kinodance, société qu’elle a fondée à Boston avec la chorégraphe Alissa Cardone et le plasticien Dedalus Wainwright, et qui souhaite effacer les frontières entre la danse, le cinéma, les arts visuels et la musique. C’est dans ce cadre qu’est né Cunnningham, qui a pour ambition de dresser le portrait d’un des danseurs et chorégraphes les plus visionnaires du 20e siècle. Merce Cunningham a en effet contribué à l’émergence de la danse contemporaine, grâce entre autres choses à sa volonté de laisser le hasard déstabiliser ses productions. Débutant sa carrière chez Martha Graham, il va créer sa propre compagnie au début des années 1950.

Le début

Lorsqu’on lui demande d’évoquer le style de danse qu’il chorégraphie, Merce Cunningham ne sait pas quoi répondre. Il refuse de qualifier ses œuvres de danse moderne ou de danse contemporaine : pour lui, l’important est la danse. Il considère que le mouvement est la base de son travail et ne veut pas intellectualiser son travail. Il se souvient de ses débuts, dans un petit studio, il avait alors du mal à joindre les deux bouts. C’est la rencontre avec le compositeur de musique contemporaine John Cage qui va le décider à entamer sa carrière de danseur solo. Les deux hommes vont, à partir du milieu des années 1940, former un couple dans la vie privée comme dans la vie professionnelle. Bientôt reconnus sur la scène internationale, ils vont créer quelques années plus tard la Merce Cunningham Dance Company, où le chorégraphe va former de nombreux élèves et produire des pièces qui deviendront célèbres.

Analyse

L’intérêt majeur de Cunningham est de nous montrer l’œuvre de Merce Cunningham. On ne peut pas dire que ses productions soient diffusées très régulièrement dans les médias les plus populaires, et le geste artistique et commercial de produire un documentaire de cinéma sur l’artiste mérite d’être signalé. Reste à savoir si les personnes qui ne connaissent pas l’œuvre du chorégraphe se déplaceront pour aller voir le film, car c’est, on le ressent durant la vision du documentaire, la volonté tacite de l’opération. Alla Kovgan prend en effet bien soin de nous raconter assez scolairement la biographie de Merce Cunningham, comment et pourquoi son œuvre aura des répercussions dans l’approche contemporaine de la danse. Le propos est certes passionnant, mais pas novateur : ceux qui ont de près ou de loin entendu parler du chorégraphe n’apprendront pas grand-chose. Au moins le film laisse-t-il une place non négligeable aux performances artistiques.

Et c’est là que le spectateur de Cunningham pourra se sentir à la fois comblé et frustré. Comblé de voir ces productions, où l’on se rend compte du talent de Merce Cunningham et de sa troupe. Visuellement splendides, ces corps dansants produisent à l’écran une émotion palpable, renforcée par ce choix d’alterner des images d’archives et des reconstitutions. Le mélange des deux époques met en valeur le caractère intemporel des chorégraphies, et rend compte de façon assez astucieuse du côté novateur des gestes, créés il y a plus de cinquante ans et qui résonnent aujourd’hui encore. Le problème est qu’on se demande à quoi sert la 3D, dont les scènes contemporaines sont parsemées. À l’image du Pina de Wim Wenders, le film d’Alla Kovgan souhaite donner aux spectateur une vision en relief des chorégraphies. Sauf qu'ici ça ne donne rien du tout, le procédé s’avére superfétatoire et inutilement esthétisant.

Plus encore, on en vient à préférer les images d’archives dont est truffé Cunningham, et qui s’insèrent entre deux performances. Au moins Alla Kovgan a le bon goût de faire parler les protagonistes de l’époque. Nous avons ainsi droit à de nombreux monologues de Merce Cunningham, qui parle de son œuvre et de son approche concrète au travail. Il ne cherche pas à interpréter ses œuvres, se rendant compte que chacun en aura sa propre vision. Les entretiens et les images d’archives des collaborateurs du chorégraphe, de Robert Rauschenberg à Andy Warhol en passant par plusieurs des danseuses et des danseurs qu’il a formés, apportent un éclairage sur la personnalité de l’artiste. Tout ceci est passionnant mais, d’une part, aurait tout à fait pu se passer de l’artifice de la 3D, et d’autre part n’apporte finalement pas grand-chose à ce que l'on sait déjà. On ressort donc de la projection content d’avoir vu ces créations mais frustré par la forme et le fond du documentaire.

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