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Boîte noire (2021) Yann Gozlan

Boîte noire (2021) Yann Gozlan

Pubblicato 9 set 2021 Aggiornato 9 set 2021 Cultura
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Boîte noire (2021) Yann Gozlan

L’homme qui voulait en savoir trop

À l’instar du protagoniste de son film, Yann Gozlan se dit passionné par le monde de l’aviation civile. C’est une des raisons pour lesquelles il a choisi de camper son Mathieu Vasseur, qui porte le même nom que le personnage d’Un homme idéal, aussi interprété par Pierre Niney, comme un ingénieur, ayant fait ses gammes à l'École nationale de l'aviation civile et travaillant au Bureau d'enquêtes et d'analyses pour la sécurité de l'aviation civile (BEA). Pour son quatrième long-métrage, le réalisateur amateur de polar et de cinéma de genre garde dans son équipe Jérémie Guez, dont il s’était inspiré pour son dernier film en date, Burn out. Dans Boîte noire, il se fait un malin plaisir à brouiller les pistes : le film est tourné au Bourget mais fait intervenir une société d’aviation civile fictive, ses personnages travaillent au BEA mais le crash sur lequel ils enquêtent n’a pas eu lieu. Sauf qu’après l’écriture de son scénario, il a appris que des investigations étaient menées concernant la sécurité de certains avions de ligne.

Dans un avion, les pilotes s’apprêtent à manger et préviennent les hôtesses que des turbulences risquent de perturber le vol. Elles demandent aux passagers de rester à leur siège et tentent de retenir l’un d’entre-eux, qui vient de se lever. Pendant ce temps, au BEA, Mathieu Vasseur et son supérieur hiérarchique Victor Pollock regardent les images d’un accident impliquant un hélicoptère. Ils ne sont pas vraiment d’accord sur la cause de l’incident, Victor conseillant à son subordonné d’être un peu plus mesuré avant d’établir ses conclusions. Mathieu se dirige vers une salle où l’ensemble de ses collègues sont en pleine activité : un avion vient de s’écraser dans les Alpes. Après avoir discuté avec leur directeur, Philippe Rénier, Victor est désigné pour partir sur place récupérer la boîte noir de l’appareil, et il choisit Balsan pour l’accompagner. Mathieu le confronte pour lui demander pourquoi il décide de ne pas le prendre, mais Victor lui répond qu’il n’a pas le temps de gérer ses états d’âme.

La mécanique du thriller anxiogène bien huilé se déploie habilement dans Boîte noire. Comme dans les classique du genre, qui ont fait florès durant les années 1970, le personnage principal est paranoïaque à souhait et souffre de diverses pathologies plus ou moins sévères. Sa myopie l’a empêché de poursuivre son rêve d’enfant, devenir pilote de ligne, ce qui est une fois de plus un des classiques du genre. Il est surtout victime d’acouphènes sévères, l’obligeant à porter régulièrement des écouteurs diffusant des bruits blancs. Cette donnée n’est pas anodine puisque le travail de Mathieu consiste à écouter des enregistrements souvent peu audibles, et à en isoler des sons. On ne sait d’ailleurs pas si sa pathologie est due à son travail, ce qui semble le plus plausible, ou s’il avait déjà des prédispositions physiques. Cela n’intéresse visiblement pas le réalisateur, qui ne fait qu’esquisser des silhouettes utiles à son récit, ce qui d’ailleurs n’est pas problématique : on ne cherche pas ici la psychologie.

On sent que les références de Yann Gozlan dans l’écriture du scénario de Boîte noire sont nombreuses. L’ombre de Sir Alfred Hitchcock plane un peu partout, du protagoniste traqué dans tous ses mouvements à l’héroïne blonde aux agissements suspects. L’activité principale de Mathieu ainsi que sa quête obsessionnelle de vérité font évidemment penser au Blow out de Brian de Palma, tandis que le complot qu’il tente de démasquer fait pencher la balance du côté d’un Francis Ford Coppola, période Conversations secrètes, ce qui est loin d’être antinomique. Ajoutons à cela une ambiance survoltée qui évoque le cinéma de Costa-Gavras et nous voilà est bien entourés. Sauf qu’ici le discours politique n’est pas vraiment présent : il s’agit plus d’une quête personnelle et perfectionniste qu’un désir d’idéal et de lutte pour le Bien public. On le voit d’ailleurs progressivement, les dangers auxquels Mathieu est confronté sont autant intérieurs – on évoque plusieurs fois sa fragilité et ses erreurs passées - qu’extérieurs.

En cela, la construction de Boîte noire est assez astucieuse. Certes, le spectateur, aguerri et attentif, saura plus ou moins facilement déjouer les pièges faciles d’un récit ficelé de façon relativement classique. Mais pour peu que l’on se prenne au jeu, on est rapidement happé par le rythme et l’ambiance du film. Pierre Niney y évolue comme un poisson dans l'eau, quasiment en permanence à l’écran mais ne surjouant pas son personnage. Il est entouré d’une distribution harmonieuse, personne ne cherchant à tirer la couverture à soi. Lou de Laâge est à la fois séduisante et antipathique, André Dussolier s’amuse de façon à la fois sérieuse et désinvolte, Olivier Rabourdin est encore une fois sobre et efficace tandis qu’Anne Azoulay, aperçue dans Le bureau des légendes, creuse très joliment son sillon. L’ambiance musicale joue de l’atmosphère fébrile permanente, même si l’on peut regretter une surabondance de sons saturés, que l’on sent délibérés mais se révèlent parfois superfétatoires.

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