La scandaleuse de Berlin (1948) Billy Wilder
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La scandaleuse de Berlin (1948) Billy Wilder
Rivalité amoureuse dans les cendres de l’après-guerre
Peu de cinéastes se sont intéressés au destin de l‘Allemagne de l‘immédiate après-guerre. Si Roberto Rossellini concoctait dans Allemagne Année zéro un film néo-réaliste qui avait pour ambition de décrire avec acuité l’atmosphère de l’époque, La scandaleuse de Berlin utilise le lieu pour y intégrer une histoire romanesque. Il faut dire que Billy Wilder est resté attaché à Berlin, où il a vécu quelques années. En 1948, il est en train de vivre avec Charles Brackett la fin d’une des plus riches collaboration que l’âge d’or d’Hollywood ait connu. Quasiment chacun des films qu’il coécrivent est un petit bijou de scénario, ils sont souvent couronnés de succès et considérés aujourd’hui comme des classiques.
Dans un avion qui survole les ruines de Berlin en 1946, plusieurs membres du Congrès américain regardent le paysage. La seule femme à bord est celle qui reste le plus concentrée sur son travail. Il s’agit du sénateur Frost, de l’Iowa, et elle rappelle à chacun des membres de l’équipage la raison de leur voyage. Ils sont là pour vérifier par eux-mêmes les rumeurs qui courent aux États-Unis : leurs troupes d‘occupation seraient démotivées. Les soldats n’auraient pas vraiment la tête à leur devoir, et passeraient leur temps aux divers loisirs que leur offre la ville allemande. Arrivée sur le tarmac, elle tient à rencontrer le soldat John Pringle, à qui elle offre un cadeau d’anniversaire envoyée par sa petite amie.
On éprouve devant La scandaleuse de Berlin un plaisir de spectateur très simple et jubilatoire. La trame est limpide a priori, elle se compose d’un triangle amoureux, d’une intrigue d’espionnage, d’une bonne dose de glamour et d’humour. Les ingrédients sont basiques, ils fonctionnent et on en redemande : les films de cette époque en regorgent d’ailleurs. Mais Billy Wilder n’est pas pour rien considéré comme le digne successeur d’Ernst Lubitsch, pour qui il avait d’ailleurs le plus grand respect. Le scénario du film contient donc un nombre savamment calculé de rebondissements et de faux semblants. Personne n’est jamais tel qu’on pouvait le supposer au départ, et les choses s’avèrent un tout petit peu plus compliqué que ce qu’on ne pourrait penser. La finesse de l’écriture, même si au fond tout ça est très codifié, a tout de même de quoi impressionner.
Alors bien sûr, parler de La scandaleuse de Berlin sans évoquer Marlene Dietrich serait un blasphème. La vénus d’origine allemande obtient ici encore une fois un rôle à sa (dé)mesure. Une femme de tête qui fait inévitablement penser, de par l’ambiance de cabaret et de son charme vénéneux, au personnage qu'elle a incarné dans L’Ange bleu, tourné avant-guerre. À ses côtés on retrouve l’une des grandes actrices du muet, qui a su parfaitement s’adapter au cinéma parlant. Jean Harlow a ainsi tourné dans plusieurs des films de Frank Capra, souvent dans le rôle de l’ingénue qu’elle maitrise également ici. Si on n’est pas en présence du plus grand film de son auteur, qui signe tout de même une mise en scène sobre et élégante, La scandaleuse de Berlin reste un très beau film, plein de charme et d’humour, avec un zeste de romantisme un peu naïf mais dont le propos, qui fustige tour à tour l’idéologie nazi et l’impérialisme américain, fait mouche.