Valmont (1989) Miloš Forman
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Valmont (1989) Miloš Forman
On ne badine pas avec Laclos
Pas de chance pour Miloš Forman : quelques mois avant Valmont, son adaptation de Choderlos de Laclos, sortait sur les écrans Les liaisons dangereuses de Stephen Frears. Dans les coulisses, une lutte de producteurs a eu lieu : si c’est Frears qui a acquis les droits d’adaptation de la pièce, créée par Christopher Hampton à Londres en 1986, le tournage de Forman était antérieur. Certes les deux films n’usent pas des mêmes ficelles dans leurs adaptations, on ne peut néanmoins s’empêcher de mettre en parallèle les deux œuvres. Si certains critiques ont revu leurs copies depuis, la comparaison s’est largement faite au désavantage de Miloš Forman. Si celui-ci concentre son intrigue, comme le nom du film semble le suggérer, sur le personnage de Valmont, il n’en reste pas moins fidèle à la trame générale du roman original. Seulement, quand Stephen Frears fouillait la psychologie de ses personnages,Forman ne s’en tient pratiquement qu’aux faits, et rend pratiquement risibles les actions des protagonistes.
La marquise de Merteuil accompagne sa cousine, Madame de Volanges, au couvent où la fille de celle-ci, Cécile, a bientôt terminée son éducation. La jeune fille de 15 ans va bientôt être mariée, ce qui l’inquiète, et elle se lie d’amitié avec la marquise, lui demandant des conseils et de la chaperonner. Or, il se trouve que son futur mari n’est autre que Gercourt, l’ancien amant de Merteuil, et qu’il a mis son dévolu sur Cécile parce qu’il la sait vierge. De plus, la marquise apprend de son amie que le jeune homme a fait courir des rumeurs concernant sa stabilité mentale. La Merteuil décide donc de se venger, et veut profiter de l’ascendant qu’elle possède sur Cécile pour la pousser dans les bras de son ami Valmont, un coureur de jupons invétéré. Quand elle lui présente son plan, Valmont le refuse parce qu’il a d’autres projets sentimentaux. Son objectif est de séduire Madame de Tourvel, une amie de sa tante qui est chez elle pendant que son mari se trouve à l’étranger.
Dans Valmont, le personnage principal est uniquement vu comme un pâle libertin sans beaucoup d’épaisseur. On peut d’ailleurs regretter le choix de Colin Firth, à qui on donnerait le bon dieu sans confession et qui n’arrive à montrer ni sa perfidie ni le trouble qu’il éprouve face au sentiment qu’il éprouve à l’égard de Mme de Tourvel. Annette Bening, quant à elle, malgré tout son talent d’actrice, n’apporte pas à Mme de Merteuil toute la cruauté et la force que Glenn Close avait si bien su incarner. On pourra, bien sûr, arguer que Miloš Forman n’a fait que de s’inspirer du roman, assumant ses libertés artistiques, mais les similitudes narratives sont telles qu’on ne peut s’empêcher de lui en vouloir de l’avoir affadi. On survole, tout au long du film, les événements, sans aller au cœur même de l’âme des personnages. Cela donne ainsi l’impression que le réalisateur avait voulu américaniser une intrigue pourtant ancrée en France et en pleine fin du XIIIe siècle, ce qui est dommage.
Un des arguments que Miloš Forman a mis en avant dans son adaptation des Liaisons dangereuses était qu’il souhaitait se sentir le plus libre possible d’imaginer ce qui se trame entre les lignes des lettres échangées. En effet, le roman de Choderlos de Laclos est épistolaire, et Stephen Frears a largement conservé cet aspect dans son film. Ainsi, tandis que le long-métrage britannique contenait de nombreuses séquences où la voix off déclamait les courriers échangés par les protagonistes, Valmont s’applique à les mettre en image, et à les mettre en scène, tout en ajoutant du liant entre deux échanges scripturaux. L’idée est intéressante mais cela paraît étrangement plus conventionnel : Stephen Frears usait de nombreux artifices très efficaces, par exemple ces scènes ou Valmont écrivait ses lettres alors qu’il était au lit avec sa jeune « protégée », ce qui rend son film, paradoxalement, plus moderne que celui de Miloš Forman.
Ainsi, Valmont se trouve-t-il à la croisée des chemins, entre une fidélité au cadre temporel et à l’action, et des transgressions concernant la forme épistolaire et ce qui n’est pas dit entre les lignes. Or, en termes de modernité, Les liaisons dangereuses ont connu d’autres adaptations cinématographiques qui méritent que l’on s’y attarde. À la fin des années 1960, Roger Vadim choisissait d’ancrer les personnages de sa transposition au sein de son époque, et s’autorisait de nombreuses libertés. D’ailleurs, la Société des gens de lettres s’en était émue, et a contraint le réalisateur à nommer son long-métrage Les Liaisons dangereuses 1960. Trente ans plus tard, une adaptation américaine est lancée, et Cruel Intentions aura même droit à deux autres volets (pour être pointilleux, un prequel et un spin-off). La modernité est ici pleinement à l’œuvre, et les films ont contribué à lancer ou à pérenniser les carrières de Ryan Phillippe, Reese Witherspoon ou Amy Adams.