La porte du paradis (1980) Michael Cimino
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La porte du paradis (1980) Michael Cimino
On achève bien les chevaux
En 1978, Michael Cimino prenait l’Amérique à rebrousse poil avec un Voyage au bout de l'enfer qui démythifia la guerre du Vietman. Il récidiva trois ans plus tard en prenant cette fois ci comme thème les fondations de la nation américaine dans La porte du paradis. Le film coûta quelques 35 millions de dollars et n’en rapporta qu’1,5 : échec cuisant pour le studio United Artists qui ne s’en remettra pas, malgré la coupe de près d’une heure de film. Autant aux États-Unis qu’en Europe le film est incompris et mettra des années à être réhabilité. Cimino n’en démordra pas et signe en 1985 le très bon L’année du dragon ; cependant, la mise à l’écart progressive de ses pairs aura peu à peu raison de sa volonté : il ne signera par la suite que trois films, de moindre importance.
Ce qui a heurté l’opinion publique dans La porte du paradis c’est sa vision noire et sa relecture d’une histoire américaine qu’on nous montre la plupart du temps que de façon positive. Nous sommes en 1870, une promotion de Harvard fête sa « graduation ». Ils sont jeunes, beaux, pleins de rêves de justice et ont l’ambition de contribuer activement au développement de la nation. On retrouve vingt ans plus tard James Averill (Kris Kristofferson à son apogée), devenu Shérif du comté de Johnston. Venu à la ville pour faire un cadeau à la femme qu’il aime, Ella, il rencontre Billy Irvine, un de ses anciens camarade de promotion. Celui-ci lui apprend qu’une liste noire d’immigrants de son comté a été établie : accusés de vol de bétail, ces 125 individus vont être pourchassés par des mercenaires. James va tout faire pour contrecarrer leurs plans.
C’est donc une autre histoire que la sempiternelle chasse aux indiens qui nous est racontée par Michael Cimino. Dans La porte du paradis, les immigrants pourchassés sont nouvellement venus majoritairement d’Europe centrale, et c’est une lutte purement capitaliste sur la possession de la terre qui est en jeu. L’opposition se joue aussi entre une certaine vision humaniste incarnée par Kris Kristofferson et le repli sur soi des conservateurs, symbolisé par un John Hurt tout en demi-mesure. Quand à Christopher Walken, immense comme toujours, il n’a pas d’idée préconçue au départ : il est là pour exécuter un contrat et ne se pose pas de question. Voilà encore un point qui en dérouta plus d’un, l’absence de réflexion psychologique sur les personnages. Leurs motivations ne sont pratiquement jamais explicitées, leurs sentiments très peu développés.
Même dans la confrontation intime livrée entre James et Nate au sujet d’Ella (Isabelle Huppert tout à fait convaincante en maîtresse femme qui ne s’en laisse pas conter) les sentiments sont pudiquement évoqués, nul n’est besoin d’en rajouter. Car La porte du paradis n’est pas qu’un western sur la naissance d’une nation : le film englobe à la fois une dimension universelle et personnelle dans un souffle épique impressionnant. Les scènes de toute beauté se font écho l’une à l’autre, comme cette magnifique scène d’ouverture avec le bal de fin d’études qui est rappelée au milieu du film par les danses folkloriques. Les mouvements de caméra circulaires qui englobent tout l’environnement apportent un lyrisme indéniable, à l'image de cette scène où les immigrants évoluent sur la glace avec leurs patins. Impressionnant de maîtrise sur toute la longueur du film, Michael Cimino apporte ici un éclairage nécessaire sur la genèse douloureuse d’un pays qui porte pourtant le melting-pot comme étendard.