Locataires (2004) Kim Ki-Duk
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Locataires (2004) Kim Ki-Duk
Le dernier romantique
À la fin des années 1990, Kim Ki-Duk débute sa carrière de cinéaste, enchaînant en moyenne un film par an, avant d'avoir son premier succès, L'île, sélectionné au Festival de Venise. C'est à cette même Mostra qu'il obtiendra la récompense du Lion d'Argent pour Locataires en 2004, après avoir sorti le magnifique Printemps, été, automne, hiver... et printemps. Les interprètes principaux de Locataires, Lee Seung-yeon et Jae Hee, ont surtout évolué à la télévision coréenne, tandis que l'on y retrouve une des actrices récurrentes des flms de Kim Ki-Duk, Park Jee-ah.
Le début
Tae-suk est un solitaire qui se promène en moto, collant des menus à emporter sur les trous de serrure des portes d’entrée et pénétrant dans les appartements où les menus n’ont pas été supprimés. Il vit dans ces appartements pendant que leurs propriétaires sont absents, lave leurs vêtements, répare leurs appareils brisés et prend des selfies avec leurs biens. Lorsqu’il entre par effraction dans une grande maison, il ne sait pas qu’il est surveillé par une femme au foyer maltraitée et un ancien mannequin, Sun-hwa. Tae-suk part après avoir établi un contact visuel avec Sun-hwa, mais revient ensuite.
Analyse
Ainsi la poésie et le romantisme existent encore dans ce bas monde. Mais dans Locataires point d'histoire à l'eau de rose, juste une « poésie du quotidien », une sensualité à fleur de peau. Sur une histoire extrêmement originale, Kim Ki-Duk réussit par de subtiles touches à nous convaincre de l'amour naissant entre ces deux êtres largués qui ont besoin l'un de l'autre comme le désert a besoin de la pluie. Le silence qui règne durant une grande partie du long-métrage peut alors s'interpréter comme une métaphore de la situation marginale de ces deux être que la société refuse de voir, le sans-abri et l'épouse maltraitée.
C'est par la mise en scène que tout passe, et l'économie des dialogues renforce se sentiment de délicatesse qui nous étreint à la vision de ces images évocatrices. Le film n'échappe cependant pas au risque narratif du genre : une intrigue qui traîne en longueur sur la fin. Kim Ki-Duk affiche toutefois dans Locataires une maîtrise esthétique et de la mise en scène, sans déployer de grands moyens ni d'effets tape-à-l’œil. Le prix de la mise en scne qu'il reçut à la Mostra de Venise n'est pas volé, sachant que la même année il décrochait l'Ours d'argent du meilleur réalisateur au Festival de Berlin pour Samaria.
Les acteurs sont épatants de simplicité et de sincérité : pratiquement sans aucune parole, ils nous font ressentir des émotions et font vivre ces personnages lunaires et néanmoins attachants. Comme à son habitude, Kim Ki-Duk ne se livre pas dans son film à des interprétations claires et tranchées, une libre place est faite au subjectif, à l'imagination du spectateur et au ressenti. On est émus et on est transportés dans Locataires, c'est la magie du cinéma, tout simplement. Quelques grammes de finesse dans un monde de brutes, oui, et ça ne fait pas de mal de temps en temps.