Mon voisin Totoro (1988) Hayao Miyazaki
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Mon voisin Totoro (1988) Hayao Miyazaki
Miyazaki au pays de Lewis Carroll
Deuxième film de Hayao Miyazaki pour le studio Ghibli après l’excellent Château dans le ciel, Mon voisin Totoro a paraît-il en grande partie été inspiré par les souvenir d’enfance de Miyazaki. Il s’imaginait quand il était petit que des créatures fabuleuses hantaient la maison où il habitait. Dès le début des années 1980, le réalisateur avait proposé au producteur Yasuyoshi Tokuma un scénario qui fut refusé. Remaniée, l'histoire est transposée dans le passé et après plusieurs autres réticences, le producteur Toshio Suzuki parvient à convaincre des financeurs. Il leur soumet l'idée de produire en parallèle Le tombeau des lucioles, et de diffuser successivement les deux films à des publics scolaires. L'écho dont bénéficiera les dex films lui donnera raison, apportant au studio d'animation une renommée internationale.
Un jeune anthropologue, professeurà l'université, emménage dans un village avec ses deux filles, Satsuki, dix ans, et Mei, quatre ans. Elles prennent leur marque dans ce nouvel environnement, et découvrent pas très loin de leur maison un très grand camphrier. Curieuses, elles y entrent et y trouvent des glands ainsi qu'une pièce pleine de petites créatures, les susuwatari, que leur père nomme des noiraudes. En tentant de prendre une de ces petites bêtes, Mei a les mains pleines de suie. Puis les deux enfants font la connaissance de leur voisine, une grand-mère qui leur raconte que les noiraudes vont bientôt partir car elles n'aiment pas avoir de compagnie. La vieille femme fait peur à la petite Mei, qui se réfugie auprès de sa grande sœur. Ils nettoient la maison et s'installent quand le petit-fils de la voisine vient leur apporter uncadeau de bienvenue.
Quittant l’univers totalement irréel et fantastique de son premier film, Hayao Miyazaki s’attache dans Mon voisin Totoro à dresser le portrait de deux petites filles déménageant dans une nouvelle maison. Le début du film n’a rien de surnaturel mais il est très joliment mis en images. On sent peu à peu l’appréhension que ressentent les petites filles dans cette nouvelle maison, mais aussi celle de leur jeune voisin timide et maladroit. Soudain, à la faveur d’une escapade nous apparaît un univers plus onirique et ùerveilleux en la personne des totoros, ces êtres merveilleux capables d’accomplir des actions extraordinaires Ils tiennent d'ailleurs leur nom, pirouette malicieuse de la part du réalisateur, de la difficulté de la petite fille à prononcer le mot troll, qui se dit Torōru en japonais.
On n’est pas loin du tout de l’univers de Lewis Carroll et de son Alice au pays des merveilles. Il y a cette petite fille qui passe par un terrier pour découvrir un univers magique, un chat-bus dont le sourire énigmatique nous rappellera quelques souvenirs, et qui, au passage, tient son origine dans une vieille légende japonaise attribuant aux vieux chat des pouvoirs extraordinaires, ainsi qu'un labyrinthe en forme de haie, sans compter l’aspect onirique des deux œuvres bien sûr. Mais Mon voisin Totoro est avant tout un plaisir d’enfant, simple et innocent, celui de raconter une histoire comme ces contes que l'on écoute avant de s'endormir. Ne cherchant pas à compliquer les choses, Hayao Miyazaki raconte une histoire limpide qui ravira les plus petits et les emmènera dans un univers féérique.
Cela ne l’empêche pas d’apporter quelques touches graves, avec le personnage de la mère malade dont la mort éventuelle est clairement évoquée. C'est une chose rare dans un dessin animé, et cela acquiert une symbolique d'autant plus forte que la mère d'Hayao Miyazaki a lutté contre la tuberculose quand il était enfant. Un message écologique est également esquissé, ce qui deviendra un des thèmes récurrents dans l’œuvre du réalisateur. En parlant de continuité, les fameuses noiraudes apparaîtront aussi dans Le voyage de Chihiro, tandis qu'une peluche de Totoro aura droit à son clin d'œil dans Toy story 3. Si Mon voisin Totoro n’a pas la richesse esthétique et scénaristique d'un Princesse Mononoke, c’est un film charmant et joyeusement divertissant, sur un sujet qui ne l'est finalement pas tant que ça.