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Radioactive (2020) Marjane Satrapi

Radioactive (2020) Marjane Satrapi

Publicado el 21, jun., 2020 Actualizado 21, jun., 2020 Cultura
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Radioactive (2020) Marjane Satrapi


Atomes crochus

Présenté à la clôture du Festival de Toronto, Radioactive est le cinquième film réalisé par Marjane Satrapi. Après avoir adapté deux de ses romans graphiques et essuyé un échec commercial, elle se tourne vers des financements internationaux pour la suite de sa carrière. Elle met en scène un film horrifique avec Ryan Reynolds, sélectionné au Festival du film de Sundance, à L'Étrange Festival ainsi qu’au Festival de Gérardmer, où il décroche le Prix du public. Puis elle planche sur l’adaptation du roman graphique de l’américaine Lauren Redniss, centré sur la biographie de Marie et de Pierre Curie. Elle choisit une équipe britannique, comprenant les actrice et acteur Rosamund Pike et Sam Riley pour incarner le couple de scientifiques, et tourne son film en Hongrie. Sa première adaptation de roman graphique qui ne soit pas adapté de ses propres œuvres relate ainsi une période clé du début du vingtième siècle.

Travaillant dans son laboratoire parisien, Marie Curie, victime d’un malaise, est conduite à l’hôpital où elle perd petit à petit conscience. Elle se souvient de moment clés de son existence, dont sa rencontre avec son époux. C’était il y a trente ans, et la scientifique au caractère trempé travaillait alors à la faculté, où elle se plaignait régulièrement des conditions de travail plus que compliquées. Elle croise un jour un homme qui la bouscule et salue, en ramassant son livre, la qualité scientifique de l’ouvrage. Il se présente sous le nom de Pierre Curie et Marie s’enfuie sans donner suite à cet échange. Contrainte de chercher un laboratoire où développer ses expériences, elle se voit confrontée à de nombreux refus, avant d’oser aborder son collègue dans un cabaret. Devant un spectacle de la danseuse Loïe Fuller, il lui annonce qu’il connaît très bien son nom, et qu’il suit ses publications avec attention.

Les toutes premières scènes de Radioactive peuvent déconcentrer. Il est troublant d’entendre parler anglais après un panneau nous indiquant que nous sommes à Paris à la moitié des années 1930. D’autant plus que des dialogues ne vont pas tarder à mettre en situation Marie Curie, ses assistants et ses collègues de l’université, échangeant toujours dans la langue de William Shakespeare. Après ce premier petit sursaut, qui occasionne un léger coup à l’amour-propre du spectateur français, cette petite incohérence est très vite oubliée. Il apparait finalement certes incongru, mais pas inintéressant de voir cette biographie d’une française d’origine polonaise, née Maria Skłodowska à Varsovie, réalisée par une française d’origine iranienne, née à Rasht. Si on ajoute à cela que le matériau d’origine a été écrit par une américaine et que le casting du film est britannique, on se retrouve avec un bel objet cosmopolite.

Et pour un film en costume, Radioactive n’est pas du tout ampoulé. La mise en scène de Marjane Satrapi est assez recherchée, la réalisatrice se permettant quelques petites trouvailles intéressantes. Ainsi, au-delà du traditionnel flashback à la fin de la vie de l’héroïne, introduisant de façon classique la narration, nous avons droit régulièrement à des flashforwards afin d’illustrer les futures conséquences, appliquées, des découvertes fondamentales de notre couple. Cela permet à la réalisatrice de mettre en image, et de rendre cinématographique, des travaux scientifiques qui peuvent très rapidement être abstraits. De même, lors de la scène où Marie Curie et son époux expliquent leurs expériences, quelques inserts graphiques nous permettent de quasiment visionner les révolutionnaires pensées des protagonistes. Si on ajoute à cela un travail très subtil sur la lumière, on obtient un film plastiquement élégant.

Bien entendu, la force et la fougue de Radioactive tient beaucoup à son actrice principale. On a découvert au cinéma Rosamund Pike au milieu des années 2000 dans un James Bond, avant qu’elle ne poursuive sa carrière et qu’elle impressionne dans le Gone girl de David Fincher dix ans plus tard. Elle campe ici une Marie Curie tout à fait crédible, imposant un charisme qui fait paraître ses partenaires, très mignons en l’occurrence, un peu fadasses. Cet état de fait est d’ailleurs tout à fait cohérent pour incarner une femme forte du début du vingtième siècle, qui n’hésita pas à imposer ses visions et à faire avancer sur le terrain les droits des femmes. Une scène, très simple, du film est à ce titre émouvante, où l’on découvre Marie Curie debout sur une estrade devant un parterre où l’on ne distingue au début que des hommes, quand tout à coup une femme se lève de l’assemblée et l’applaudie, bientôt rejointe par plusieurs autres. La sobriété vaut parfois mieux qu’un long discours.

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