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My own private Idaho (1991) Gus Van Sant

My own private Idaho (1991) Gus Van Sant

Publicado el 28, feb., 2022 Actualizado 28, feb., 2022 Cultura
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My own private Idaho (1991) Gus Van Sant

Les errances magnifique du jeune paumé narcoleptique

L’idée qui trotte dans la tête de Gus Van Sant  pour son troisième long-métrage semble a priori étonnante, voire audacieuse : mélanger dans un même film les univers de William Shakespeare et de Jack Kerouac. C’est pourtant avec ce scénario, qui plus est sur des prostitués de Portland, qu’il se pointe devant les studios à la fin des années 1980. Ces derniers sont forcément réticents et lui proposent plutôt de financer Drugstore Cowboy. Le relatif succès du film permet tout de même au réalisateur de mener à bien My own private Idaho, en prime avec les deux stars montantes de l’époque que sont Keanu Reeves et River Phoenix. Notons au passage l’audace de ces derniers qui n’hésitent pas à interpréter deux homosexuels, de plus toxicomanes, prostitués et marginaux. Sélectionné à la Mostra de Venise, le film permet à River Phoenix d'obtenir la Coupe Volpi de la meilleure interprétation masculine. Notons que James franco, grand amateur du film, a réalisé en 2011 My Own Private River, montage de scènes, coupées ou non, du long-métrage de Gus Van Sant.

Michael « Mike » Waters se retrouve seul sur une autoroute, et se met à se parler avant d'être victime d'une crise de narcolepsie. Il se réveille dans un endroit sordide où il se prostitue, puis part dans l'appartement cossu d'une cliente, où il retrouve deux de ses collègues. L'un d'eutre eux est le beau Scott Favor, le fils rebelle du maire, qui prétend quitter le monde de la prostitution quand il héritera de l'empire de son père, et dont la désinvolture et le charisme attirent tous ceux qu’il approche. Avec leur mentor, un homme extravagant nommé Bob Pigeon, ils habitent dans un vieil hôtel désaffecté, échappent aux rafles de la police et traînent dans les cafés. Mike a quant à lui une idée obsédante : celle de retrouver sa mère, figure mythique qu’il a peu connue et qui lui manque terriblement. Il se rend donc avec Scott dans l'Idaho afin de retrouver son grand frère, Richard. Durant le voyage, il confesse à son ami qu'il est amoureux de lui, mais Scott lui répond qu'il est hétérosexuel, et ne couche avec des hommes que pour l'argent.

Là réside le cœur même du cinéma indépendant américain, bouillonnant et incandescent. Gus Van Sant établit ici en quelque sorte un manifeste gay dans lequel peuvent aussi se reconnaître tous les marginaux. Les interviews de ces véritables prostitués de Portland, l’atmosphère de cet hôtel à la fois délabré et magnifique, le portrait de ces personnages en errance sont en parfaite filiation avec la beat generation de Jack Kerouac ou de William S. Burroughs. Le réalisateur américain est un amateur inconditionnel de cet univers, et cela se voit encore une fois ici. Mais ne retenir que cet aspect de My own private Idaho serait passer à côté de mille autre choses qui le composent, et qui font du film un ovni cinématographique étrange et magnifique. Le film échappe à toute classification traditionnelle : à la fois hommage au western et au road movie, à la tragédie shakespearienne et au drame quasi-romantique, et furieusement sensuel, il mélange les genres de façon remarquable.

On peut en effet entendre dans My own private Idaho des pans entiers de dialogue de pièces de Shakespeare (Henry IV et  Falstaff en l’occurrence, ce qui amena certains critiques à rapprocher ce film à celui d’Orson Welles), instaurant un climat hiératique et imposant des références très classiquement théâtrales. Mais l'on y trouve aussi des scènes ubuesques et d'une modernité à toute épreuve, telle celle où Mike se déguise en groom pour exciter un vieux libidineux. L’originalité formelle est bien sûr d’une importance capitale, film de Gus Van Sant oblige : entre les scènes de sexe composées comme des portfolios, les gros plans sur une main épileptique, les travellings et autres petits jeux de caméras, le réalisateur s’amuse en innovant, sans paraître (encore) trop pédant. Signalons aussi une maîtrise déjà saisissante du cadrage et de la photographie, dans un récit qui condense les thématiques chères au réalisateur, et qu'il poursuivra avec sa tétralogie autour de l'adolescence.

On a envie de dire que c’est ici l’apogée de la carrière de River Phoenix, mort deux ans plus tard et qui réalise une performance époustouflante en paumé terriblement attachant. Keanu Reeves ne démérite pas non plus en cassant son image de play-boy lisse dans un rôle dur et complexe. Les thèmes évoqués, riches, tournent autour de la quête identitaire, entre un garçon qui recherche désespérément l’amour (de sa mère ou d’un autre, la scène centrale du feu de camp est à ce titre poignante de simplicité) et un autre qui rejette en bloc l’autorité paternelle, lui préférant un père adoptif qu’il s’empressera toutefois de rejeter une fois ses enseignements transmis. On peut donc voir My own private Idaho comme un rite de passage de l’adolescence à l’âge adulte, Scott préférant tourner le dos à son ancienne vie tandis que Mike assume pleinement son altérité et continue de tracer la route qu’elle lui fait mener. On retrouve chez le premier un lien avec le personnage shakespearien de Henry V, qui quitta la protection d'un Falstaff pour vivre son indépendance.

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Comentario (2)

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Alexia Monrouzeau hace 2 años

si je peux me permettre, déjà il y a 5 ans le sigle s'était étoffé d'un A+. Pour tenter d'être complet : LGBTQIA+, histoire de pas avoir à suivre les AA, AO ou autres ZQIAUYTE...ou pas.

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Jean-Philippe Rathle hace 2 años

Bonjour Alexia, merci de votre commentaire. En effet, je tâcherai de le prendre en compte.

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