Un dernier au revoir
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Un dernier au revoir
Que reste-t-il de notre enfance ? De nos fou-rire ? De notre innocence ?
Cela fait si longtemps que je n’avais osé revenir ici. Dans cette imposante maison qui m’a vu grandir. Gravir les marches de cet escalier. Revoir cette grande cuisine si souvent débordante de vie. Fouler le sol de ce salon dans lequel persiste l’écho de tant de rire. De cris. De pleurs. De joie…
Impossible de réprimer un sanglot. Tant de souvenirs resurgissent. Les bons comme les mauvais. Les Noël en famille. Les après-midi improvisés. Les fouilles dans les vieux greniers. Les disputes autour d’un dîner…
C’est étrange de me retrouver ici après toutes ces années. Les lieux sont vides. Les papiers peints tachés d’humidité. La moquette moisie… Les meubles ont tous été enlevés. Les photos et les tableaux aussi. Il ne reste que la poussière et les fantômes.
Quelques pas encore. Je pousse la porte de notre chambre. Nos lits ont disparu. Mais pas les dessins sur les murs. Témoins de notre folle jeunesse… Je ne peux m’empêcher de les caresser du bout des doigts. En souriant.
Mon regard se pose sur une minuscule plume. Abandonnée. Seule sur le sol. Éclairée par un rayon de soleil traversant les volets. Une plume bleutée. Semblable à celles de nos oreillers. Ceux avec lesquels nous nous battions… Comme ce fameux soir. Celui où j’ai dû quitter la maison. Celui où il m’a fallu te dire adieu. Je venais d’avoir 18 ans…
Encore aujourd’hui, il m’est insupportable de repenser à cette soirée. À cet instant, où ils ont débarqué. Ce jour où ma vie a basculé…
Dieu merci, je m’en suis sortie. J’ai survécu à cet enfer, malgré toutes les tortures, les sévices… les abus. Je suis restée forte pour toi, petite sœur. Pour que tu n’aies jamais à subir ça.
Mais ce n’est que bien des années plus tard, que j’ai appris que tous mes efforts étaient vains. Que tu étais partie… Tu étais si jeune. Jamais tu n’aurais dû avoir affaire à eux. Je suis désolée. Tellement désolée…
Les larmes aux yeux, je sors de notre chambre. Je descends l’escalier. Il fait si sombre dans l’entrée… Je ne sais pas réellement pourquoi je suis ici. La nostalgie. La culpabilité…
La porte s’ouvre doucement dans un grincement familier. La gorge serrée. Je sors d’un pas décidé. Jamais plus je ne reviendrais. Jamais plus…
20 minutes chrono, sans relecture.
Texte de L.S.Martins.
Image par Christine Sponchia de Pixabay : La Plume Faciliter Légèrement - Photo gratuite sur Pixabay