Tout sur ma mère (1999) Pedro Almodóvar
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Tout sur ma mère (1999) Pedro Almodóvar
À toutes les femmes qu’il a aimé
Il est des films qui vous touchent et vous marquent tout particulièrement même s’ils ne sont pas parfaits ; Tout sur ma mère en fait partie. C’est le treizième film de Pedro Almodóvar, qu’il dédicace aux trois actrices intemporelles que sont Bette Davis, Gena Rowlands et Romy Schneider, et pour lequel il reçu un Prix de la mise en scène au Festival de Cannes. Le réalisateur qui a toujours fait la part belle aux femmes et aux actrices, de Femmes au bord de la crise de nerfs à Talons aiguilles, compose ici un film presque entièrement féminin qui évoque la mort pour mieux parler de la vie.
Le début
Esteban, un adolescent espagnol, vit avec sa mère dans un très vieil appartement. La veille de ses dix-sept ans, ils regardent ensemble All about Eve et sa mère lui offre l’exemplaire d’un livre de Truman Capote que l’écrivain en herbe apprécie particulièrement. Le lendemain, à la sortie d’une représentation d’Un tramway nommé désir, Esteban demande à sa mère d’attendre sous une pluie battante l’actrice principale, Huma Rojo. Pour la première fois, Manuella lui parle de son père et lui promet de tout lui raconter une fois rentrés chez eux. Elle n’en aura jamais l’occasion : le destin en décidera autrement.
Analyse
Cette scène magnifique d'ouverture fait écho à Opening night, de John Cassavetes, tout comme de nombreuses scènes du film rappellent bien entendu l’Eve de Joseph L. Mankiewicz. Ces jeux de miroir, ces hommages très délicats bien qu'appliqués, donnent à Tout sur ma mère un cachet encore plus singulier. Pourtant Pedro Almodóvar ne signe pas ici un film classique au sens propre du terme : le scénario, très emberlificoté, nous montre au contraire toute une pléiade de personnages iconoclastes qui dénoteraient dans nombreuses productions.
Prostituées, travestis, lesbiennes, séropositifs, tout ce petit monde n’est, dans Tout sur ma mère, jamais montré sous l’œil voyeur de la caméra, bien au contraire. Et Pedro Almodóvar de nous faire avaler les couleuvres de son scénario avec de la vaseline, tout en martelant comme toujours son message de tolérance et d’amour. Amour du cinéma, des actrices, des personnages ; amour d’une mère à son fils, d’une fille à son père. Un père grand absent du film, l’inconnu des photos déchirées qui va enfin renouer virtuellement avec son fils lors d’une transmission symbolique et bouleversante.
Film qui joue tout du long sur la corde sensible, Tout sur ma mère ne verse jamais dans le sentimentalisme bas de gamme : la mise en scène superbement maîtrisée de Pedro Almodóvar reste toujours sobre et il agrémente habilement son film de l’humour très particulier qu’on lui connaît. Ajoutons aux qualités du film l'interprétation impeccable des actrices, et le charme de l’acteur ibère Eloy Azorín, beau comme un dieu. Notons que si on retrouve l’aspect baroque du réalisateur de la movida, Almodóvar amorce ici un léger virage dans sa filmographie qu’il poursuivra par la suite avec Parle avec elle.