Les choses de la vie (1970) Claude Sautet
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Les choses de la vie (1970) Claude Sautet
Le seul mauvais choix est l'absence de choix
Le début des années 1970 voit apparaître sur les écrans français Les choses de la vie, troisième long-métrage de Claude Sautet. Il a commencé sa carrière dix ans plus tôt avec un polar au casting duquel figurait Lino Ventura, qui sera également dans son film suivant, d'un tout autre genre puisque c'est l'aventure qui ici prend le pas. Il est alors peu considéré par une critique tournée vers la Nouvelle vague, et le malentendu se poursuivra avec ce premier drame, un genre que Sautet privilégiera désormais. On lui reproche de ne s’intéresser qu'à des personnages bourgeois dans une France pompidolienne qui ne connaît pas encore la crise. Il adapte ici un roman de Paul Guimard, journaliste et écrivain qui, ironie du sort, effectuera au début de la présidence de François Mitterrand une mission gouvernementale pour les questions culturelles.
Le début
Un grave accident prend pour victime Paul dans une petite route de campagne. Celui-ci se souvient des jours qui viennent de se passer. Avec sa compagne Hélène, il prévoyait de partir s'installer en Tunisie, et elle lui demande avant qu'il parte de signer les papiers pour finaliser leur départ en juillet. En allant au travail, il passe prendre en voiture son ami François, qui lui demande des nouvelles de son fils et de son ex femme, Catherine, avec qui ils passaient souvent des étés dans leur maison de l'île de Ré. Il retrouve celle-ci à son lieu de travail et ils partagent ensemble un moment de complicité, après que Paul ne se soit énervé contre un promoteur immobilier un peu trop gourmand à son goût. Après qu'ils se soient dit que dorénavant chacun avait sa vie et que c'était mieux comme ça, Catherine lui rappelle qu'il doit se rendre à Rennes pour un rendez-vous de travail.
Analyse
Sorte de condensé de la carrière future de son réalisateur, Les choses de la vie peut également se voir comme un instantané de la société française de l'époque. Les images peuvent aujourd'hui paraître datées, c'est parce qu'elles sont ancrées dans une réalité, celle des années 1970, un temps d'après les crises, une époque des Trente Glorieuses qui aujourd'hui peut nous paraître surannée. Ainsi un charme certain, peut-être un peu désuet, se dégage des images qui défilent devant nos yeux, et c'est l'ensemble des années 1960 que nous contemplons, avec ces 4L et ces standardistes des PTT, ces Gauloise et ces tailleurs Courrèges. Et pourtant le discours de Claude Sautet est éternel, puisqu'il nous parle, encore et toujours, d'amour et de lâcheté, de la nécessité de faire des choix et de ces petits moments de bonheur qui passent devant nous sans qu'on les voit.
Le titre du film le résume parfaitement, et en substance ce n'est que ça, ces petites choses d'une existence que l'on voit défiler alors que le corps lutte entre la vie et la mort. Ce n'est que ça, Les choses de la vie, et pourtant c'est beaucoup. Et jamais Claude Sautet ne prend un ton sentencieux pour asséner un discours qui pourrait être aisément moralisateur. Le choix du réalisateur se porte sur le sensible, le souffle du vent, la nuque d'une femme, un après-midi sur un bateau. Et pourtant c'est un film tout en contrastes qu'il construit, prenant soin de lui apporter un ton tragique pour mieux relever les moments de douceur. Car dès le début, le spectateur est prévenu : le personnage principal est victime d'un accident de voiture, et l'on va tout du long être plongé dans ses pensées. De même, il n'est pas bien courageux, puisqu'il n'ose pas dire à sa maîtresse qu'il souhaite la quitter, elle qu'il a tant aimée.
Pour incarner le rôle principal du film, Claude Sautet fait appel à Michel Piccoli qui, après une riche décennie des sixties qui l'a vu percer, fait preuve d'une finesse et d'une délicatesse qui sied parfaitement à son personnage. Face à lui, Romy Schneider est resplendissante, trentenaire éclatante de charme alors que sa carrière vient d'être relancée par La piscine ; elle ne se doute alors pas quelle fructueuse collaboration l'attend avec Sautet. Entre les deux Lea Massari a du mal à s'imposer mais c'est toujours un plaisir de la voir comme un clin d’œil, dix ans après L'avventura. Et puis Les choses de la vie, c'est aussi la première fois que se croisent, professionnellement parlant, Claude Sautet et Jean-Loup Dabadie. Et puis c'est la musique de Philippe Sarde, et cette mélodie, La chanson d'Hélène, qui ne figure pas dans le film, et qui pourtant en deviendra le symbole.