Broken flowers (2004) Jim Jarmusch
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Broken flowers (2004) Jim Jarmusch
Que sont nos amours devenues ?
Avec Broken flowers, Jim Jarmusch, le réalisateur indépendant new-yorkais, poète underground qu’on adore aimer, a failli devenir populaire. Il obtint même un Prix du jury au Festival de Cannes, et s’offrait alors les faveurs de la plupart des médias, des Inrockuptibles à Isabelle Quint en passant par Télérama. Même le grand public l’a plus ou moins suivi avec ce film, assurément plus accessible qu’un Dead man ou qu’un Permanent vacation. On a pu par la suite se « rassurer » avec The limits of control, tout aussi encensé par les critiques mais nettement moins suivi par le grand public.
Reste que Broken flowers, comédie teintée de mélancolie, est franchement jubilatoire. On suit, fasciné par ce personnage désabusé, le périple de Don Johnston (oui, oui, avec un « t ») à travers les États-Unis à la recherche de ses amours perdues. Les paysages justement jouent un rôle essentiel, étant donné qu’on passe une bonne partie du film quasiment en caméra embarquée dans la voiture du protagoniste. Les grands espaces américains sont sublimés par cette caméra qui réussit à capter la diversité du pays.
Si les images de Broken flowers sont d’une qualité indéniable, la musique qui les accompagne est également de toute beauté. En amateur musical averti, Jim Jarmusch nous fait cette fois découvrir un compositeur de jazz éthiopien, Mulatu Astatke, et installe une atmosphère à la fois soul, country et jazzy. Les mélopées séduisantes du jazzman nous suivent même après la vision du film.
L’un des atouts indéniable de Broken flowers est aussi son casting irréprochable. On ne le dira jamais assez, Bill Murray est un acteur étonnant : il peaufine ici son personnage d’homme mûr lassé par l’existence et drôlement attachant. Si on peut s’agacer qu’il ne joue maintenant plus que ce genre de rôle, il faut bien admettre qu’il l’incarne parfaitement.
Il est accompagné dans ce Broken flowers par un quatuor d’actrices sublimes qui assument (et c’est assez rare dans les films américains) pleinement leur âge : Sharon Stone est toujours aussi désirable, Jessica Lange est rayonnante, Tilda Swinton fulgurante et Frances Conroy toujours aussi « Six feet under ». Par le biais de sketchs drôlissimes, on apprend à connaître ces femmes, et le film prend alors tout son ampleur : on découvre petit à petit la teneur de cette quête vers le bonheur perdu de cet homme à femmes, un homme qui à trop vouloir les aimer toutes n’a pas réussi à n’en garder qu’une.