Suis-je folle ?
Su Panodyssey puoi leggere fino a 10 pubblicazioni al mese senza effettuare il login. Divertiti 9 articles da scoprire questo mese.
Per avere accesso illimitato ai contenuti, accedi o crea un account cliccando qui sotto: è gratis!
Accedi
Suis-je folle ?
– Laisse ouvert.
– Quoi ? Mais tu es folle ! Risquer de se faire tuer pendant notre sommeil ! Ou pire, de se faire violer… Ça va pas, ma vieille ?
– Un jour, il faudra vraiment qu’on rediscute de ton sens des priorités… Mais pour cette nuit, s’te plaît, laisse entrouvert. Personne ne s’en rendra compte.
Ma coloc me regarda sans un mot, leva les yeux au ciel et claqua la porte. Quelle conne ! Je l’entendis se cogner dans son bureau avant d’atteindre son lit. Elle grogna un « bonne nuit » et se retourna vers le mur, à en juger par le bruit de son sommier.
Bonne nuit… Elle ignorait ce qu’il se cachait dans l’obscurité. Elle n’avait jamais aperçu ces monstres terrifiants. Pas comme moi. Je pouvais les voir chaque nuit. Ils revenaient hanter mes rêves et me tenaient éveillée jusqu’à l’aube. Car la lumière les faisait fuir. Ils en avaient horreur !
Mais comment lui dire ? Comment lui expliquer sans passer pour une folle ? J’avais déjà essayé, plus jeune. Et cela m’avait coûté cher ! Plusieurs mois en « maison de repos », comme disait ma mère pour ne pas prononcer « asile psychiatrique », et une montagne de cachets. Au début, je leur racontais ce que je voyais dans le noir. Leurs visages. Leurs mains qui tentaient de m’attraper. J’étais jeune et naïve. Je croyais sincèrement qu’ils voulaient m’aider. Quelle idiote. Alors, un jour, lors d’une de mes séances quotidiennes, je mentis. J’annonçai fièrement à cet abruti face à moi que j’allais beaucoup mieux. Que ces hallucinations avaient totalement disparu, grâce à eux. Il fallut plusieurs rendez-vous pour qu’il en soit convaincu, mais au bout d’une semaine ou deux, j’étais enfin dehors.
Je n’en ai plus jamais parlé. La nuit, je gardais une lampe allumée, cachée sous mes couvertures. Mais aujourd’hui, j’ai la sensation que cela ne suffit plus. Qu’ils sont plus forts. La lumière de mon portable ne leur fait plus peur. Hier, j’ai senti une main me saisir la cheville. Ses griffes m’ont écorché la peau, me laissant des plaies béantes et cuisantes.
Pourquoi moi ? Je veux dire, pourquoi suis-je capable de les voir ? De les sentir ? Suis-je réellement folle ? Blottie dans mes draps, mon portable à la main, je restais attentive au moindre bruit, au moindre mouvement. Perdue dans l’obscurité, je tentais vainement de ne pas fermer les yeux. De ne pas m’endormir.
15 minutes chrono, sans relecture.
Texte de L.S.Martins
Image par Pexels de Pixabay : Sombre Porte Poignée De - Photo gratuite sur Pixabay