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Pas d'autre choix

Pas d'autre choix

Pubblicato 23 set 2022 Aggiornato 23 set 2022 Cultura
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Pas d'autre choix

Je pensais en avoir fini avec toute cette histoire, mais il a fallu que je tombe dessus. Je me retrouve nez à nez avec ce monstre de métal. Il me nargue, même après toutes ces années. Comment est-il arrivé ici reste un mystère. Il est dans un triste état, pourtant, je suis certain, c’est bien lui. Je le reconnaîtrais entre mille. Je pourrais simplement l’ignorer, poursuivre ma route sans y prêter attention, mais il hanterait mes jours et troublerait mes nuits. Je n’ai d’autre choix que de l’affronter. Que de lui tenir tête.

Je n’avais que quinze ans, la dernière fois que j’ai marché sur ce pont. En manque d’aventures, je partais rejoindre les Amériques à bord de ce vieux cargo. Le capitaine avait accepté que je monte à bord à condition que j'effectue ma part de boulot : nettoyer les cales, aider les cuistots et servir les matelots. Les sales besognes ne m’effrayaient guère. J’en avais vu d’autres. Alors, pour moi, c’était une aubaine ! J’allais enfin quitter ma vie de merde… Comment aurais-je pu savoir que j’embarquais sur un navire maudit ? Que j’entamais un voyage vers l’enfer ?

Le capitaine m’avait interdit de sortir de ma cabine la nuit, prétextant qu’il ne me chercherait pas si, par mégarde, je passais par-dessus bord. Alors, les premières semaines, je restais bien sagement dans le noir de mon placard. Malgré la chaleur épouvantable et l’odeur de transpiration. Malgré les bruits exaspérants et inquiétants. Mais plus le temps passait et plus ma curiosité me piquait.

Un soir de pleine lune, je me faufilai hors de ma couchette. La nuit était claire, la mer était calme et l’air si frais et pur. Un véritable bonheur. J’allai me planquer dans un rafiot de sauvetage pour m’y allonger et enfin dormir. Ça, c’est ce que je croyais. En réalité, après cette sortie, plus jamais je ne fus capable de fermer les yeux sans faire d’horribles cauchemars. Car ce que je vis, cette nuit-là, me glaça le sang. Je côtoyais, sans même m’en douter, de véritables monstres. Des créatures immondes. Indescriptibles… Seuls quelques-uns avaient encore allure humaine. Ceux qui s’apprêtaient à se faire dépecer vivants pour finir dans les marmites.

Je vomis mes tripes. Moi qui croyais que mes maux de tête et mes pertes d’équilibre étaient dus au mal de mer… quel con ! Sans réfléchir une seconde, j’attrapai une bouée et pris mon envol direction la flotte. Je n’avais aucune chance de survivre. Je ne savais même pas où nous étions, mais peu importe. Je devais fuir. Mettre de la distance entre ces choses et moi.

J’ai dérivé durant des jours sous un soleil de plomb. La fièvre me rongeait. Les délires aussi. Et depuis, ils n’ont cessé de me torturer. Je n’ai aucune idée de comment j’ai survécu. La seule chose dont je me souviens, c’est de m’être réveillé dans un lit froid. Entre quatre murs d’un blanc douteux. Sans fenêtre. Sans air. Une nouvelle prison de laquelle je mis plus de temps à m’évader. Deux ans exactement. Deux années au cours desquelles les traitements contre la folie se sont succédé, les ateliers de discussions se sont multipliés, les tête-à-tête avec les médecins se sont répétés. Jusqu’à ce que je comprenne enfin ce qu’ils attendaient tous de moi : avouer que les monstres n’existent que dans mon imagination.

Depuis ce jour, je parcours le monde tentant de fuir mes névroses. De me soustraire à mon tourment. En vain. Et voilà qu’à présent, je me trouve face à mes démons. Suis-je réellement prêt à les affronter ? J’en doute. Qui le serait ? Mais je n’ai pas le choix. Je dois le faire. Pour me libérer. Pour recouvrer un semblant de paix.

 

Texte de L. S. Martins ( 30 minutes chrono, sans relecture). 
D'après Image par Willgard Krause de Pixabay : Fantaisie Peint Bateau - Photo gratuite sur Pixabay.

 

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