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Plaire, aimer et courir vite (Christophe Honoré, 2018)

Plaire, aimer et courir vite (Christophe Honoré, 2018)

Publié le 6 déc. 2021 Mis à jour le 6 déc. 2021 Culture
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Plaire, aimer et courir vite (Christophe Honoré, 2018)

J'avais juré de ne plus jamais remettre les pieds dans le cinéma de Christophe Honoré, l'un des réalisateurs parmi les plus affectés du cinéma français actuel dont j'ai détesté chacun des films que j'ai pu voir. Mais le passage de "Plaire, aimer et courir vite" sur Arte m'a donné quand même envie de le voir à cause des deux acteurs principaux que j'aime beaucoup: Pierre Deladonchamps et Vincent Lacoste. Le fait est qu'ils sont impeccables, chacun dans leur registre et qu'ils vont bien ensemble. Il y a aussi incontestablement un caractère intimiste et personnel dans ce film qui convoque les fantômes d'un grand nombre d'artistes morts du sida (ou trop jeunes et admirés par Christophe Honoré) dans les années 80 qui seraient autant de "Jacques" (l'écrivain déclinant joué par Pierre Deladonchamps) que pourrait enfin rencontrer le jeune "Arthur" (l'étudiant breton joué par Vincent Lacoste, étoile montante vraisemblablement un double de Christophe Honoré au même âge). La maîtrise technique (cadrages, lumière, mouvements de caméra) se combine à une bande sonore magnifique. J'ai beaucoup écouté Cocteau Twins à une époque, Ariodante à une autre et la scène qui l'accompagne est particulièrement belle. Quand aux "gens qui doutent" de Anne Sylvestre, c'est une chanson sublime et elle accompagne également une très belle scène intimiste dans laquelle Jacques est en proie à des sentiments contradictoires qui le font souffrir.

Néanmoins ce qui me déplaît dans le cinéma de Christophe Honoré n'a pas disparu comme par magie. En particulier le côté verbeux-prétentieux. Autant les scènes musicales ou simplement chorégraphiées sont réussies, autant les scènes dialoguées brisent le charme par leur caractère souvent péremptoire, poseur, ampoulé et condescendant. C'est censé refléter le caractère de diva du dandy qu'est Jacques (et son métier, écrivain) sauf que cela revient de film en film comme une signature, celle de Christophe Honoré. Ainsi grâce à lui, on saura que manger des BN au petit déjeuner c'est un truc de plouc (ça c'est dans "Métamorphoses"), que les hôtels bon marché puent l'eau de javel (ça c'est dans "Plaire, aimer et courir vite") et que nous, pauvres spectateurs de la plèbe ne sommes "pas des Lumières" (ça c'est dans "Les Malheurs de Sophie"). L'indélicatesse paradoxale d'un monsieur se définissant comme raffiné et érudit se révèle de temps à autre ainsi, au détour de ces petites phrases méprisantes, à l'image d'un personnage écrit pour une partition de mélodrame mais dont l'ego surdimensionné et le caractère dominateur font obstacle à toute forme d'empathie, particulièrement lorsqu'il prend la parole. Goujat avec les femmes, classant ses amants en catégories comme des étalons de concours (mais à partir de références littéraires, histoire d'étaler sa science en prime), se livrant à des ébats sexuels excluant son meilleur ami devenu trop vieux (Denis Podalydès, remarquable, comme ses deux partenaires)*, se querellant avec un ex en phase terminale devant son fils de 9 ans et faisant la leçon à tout le monde, Jacques a beau être gay et malade, jamais Christophe Honoré ne laisse ce versant prendre le dessus sur celui du mâle dominant version intello-bobo-macho qui contrôle et manipule à qui mieux mieux. Heureusement que Pierre Deladonchamps (ultra talentueux, je ne le répèterai jamais assez!) parvient grâce à son jeu sensible à faire passer un peu d'humanité dans le personnage. Christophe Honoré devrait par exemple apprendre outre la simplicité et l'humilité l'art du silence, comme Ada dans "La Leçon de Piano" à qui il rend un drôle d'hommage dont on ne sait si c'est de l'art ou du cochon ^^.

* L'affiche du film où l'on voit trois hommes hilares dans un lit est purement et simplement MENSONGERE. Et j'ai en horreur le mensonge.

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