Que de souvenirs...
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Que de souvenirs...
Boulangerie au virage des pains… Que de souvenirs. Jamais je n’aurais cru revenir ici un jour. J’avais quitté cette ville quelconque le jour de mes 16 ans, en me promettant de ne jamais y remettre les pieds. Sans un mot, j’avais claqué la porte de chez mes parents et dit adieu à cette vie de misère. J’avais tiré un trait sur tous ceux que je connaissais pour partir sillonner le monde.
J’avais été ce fils ingrat qui maudit ses parents pour tout ce qu’il n’a pas : un avenir rempli d’aventures et de gloire. Fils de boulanger, ça ne me faisait pas rêver. Surtout quand je devais me lever avant l’aube pour aider au labo ou rester coincé derrière la caisse toute la journée alors que les autres de mon âge jouissaient de la vie. J’étais le plus vieux d’une fratrie de cinq garçons. Les responsabilités m’incombaient, j’étais insouciant et égoïste.
Et voilà, que 30 ans plus tard, je foulais ce chemin de terre. La rue n’avait pas changé. Toujours ces mêmes maisons à colombage aux façades colorées qui se dressaient fièrement devant moi, avec leurs jolies boîtes aux lettres. Toujours cette même odeur délicieuse de pain qui flottait dans l’air quelle que soit l’heure. Toujours ces oiseaux qui attendaient patiemment que ma mère leur jette quelques miettes de la veille. Et toujours ce même écriteau au-dessus de la porte de la boutique. J’avais à nouveau 16 ans, mon baluchon sur l’épaule, le cœur lourd de mes bêtises.
Je m’approchais doucement, hésitant. J’avais peur. Peur que mes parents ne me pardonnent pas mon arrogance et mon égocentrisme. Et comment pourrais-je leur en vouloir ? Je me détestais bien assez pour ce que j’avais osé leur dire, leur faire. Mais ma punition avait assez duré et j’espérais une chose : ne pas arriver trop tard.
Soudain, une silhouette se faufila dehors. Une femme fluette que je ne connaissais pas. Elle rentrait les tableaux : c’était l’heure de la fermeture. Jadis, c’était ma mère qui faisait ça. Elle les déposait devant la vitrine à l’intérieur, effaçait leur contenu à l’aide d’un chiffon humide et de sa plus belle écriture elle ajoutait les nouveautés pour le lendemain.
D’une voix chevrotante, je l’interpellai :
- Bonsoir, Madame. Excusez-moi, vous savez ce que sont devenus les anciens propriétaires ?
Elle m’observa longuement, surprise de ma question.
- Les anciens propriétaires ? Euh, ça remonte à plus de 60 ans, ils sont p’t-être bien morts ! Mais vous pouvez entrer et demander à Madame Flogris. Elle saura p’t-être vous renseigner.
Madame Flogris, ma mère. Mon cœur battait à tout rompre. Elle se trouvait à quelques mètres, derrière cette lourde porte.
- Merci. Il est tard, je ne veux pas déranger. Je passerai demain.
- Comme vous voudrez !
Un sourire discret se dessina sur mes lèvres et, alors que je m’apprêtais à partir, j’entendis la voix de mon père qui grondait derrière moi.
- Ce monsieur te fait des misères, Jeanne ?
- Non, m’sieur Flogris. Il veut des renseignements sur les anciens proprios.
Je me retournai, la tête baissée, n’osant le regarder dans les yeux. Il se tenait devant moi, droit et fier. Il n’avait pas changé. Quelques rides, des cheveux grisonnants, mais il était toujours ce même homme. Fort et rude.
- Xavier ?
Il m’a reconnu au premier coup d’œil. Il s’est approché de moi pour me serrer dans ses bras. Il m’avait pardonné.
Texte de L. S. Martins (30 minutes chrono, sans relecture).
D'après Image par gene1970 de Pixabay : Ville Le Coucher Du Soleil - Photo gratuite sur Pixabay